«La seule façon de garantir la démocratie israélienne est de fonder un État palestinien. Le seul moyen d’y parvenir est d’en appeler à l’Europe.»
La fenêtre d’opportunité où instaurer une solution à deux États est-elle encore ouverte? Elle va bientôt se refermer, en tout cas. Chaque minute qui passe rend les choses plus difficiles. Les optimistes disent qu’il reste deux années encore avant que cette option ne s’évanouisse tout à fait. Mais viendra un moment après lequel il sera impossible de faire partir un enfant de trois ans de la colonie de Kfar Tapoua’h, en Cisjordanie, fondée par son arrière grand-père.
Les Palestiniens croient-ils l’établissement d’un État palestinien réalisable? Pas vraiment. Ils sont désespérés. Leur offensive diplomatique vacille. Qu’adviendra-t-il d’Israël sans la fondation d’un d’État palestinien? Beaucoup s’imaginent que les Palestiniens accepteront d’y vivre en tant que résidents sans droit de vote. Leur conception est que les Palestiniens feront leurs courses dans les centres commerciaux et se rendront dans les dispensaires, mais pas aux urnes. Cela constituerait une forme mieux affinée d’apartheid, qui durerait encore et toujours, pensent ces gens-là.
Si c’est là votre idée, et que vous ayez bonne conscience face à une telle vision, nous devrions rompre là – ne lisez-pas plus loin.
Que sont censés faire ceux d’entre nous qui pensent qu’un État binational représente un désastre raciste et violent, un lieu où nous ne voulons pas élever nos enfants? Le temps nous fait défaut. Combien nous en reste-t-il? Je suis aussi vieux que l’occupation. Dans deux ans, j’en aurai cinquante. «Nous avons cinq années, c’est tout ce que nous avons», chante David Bowie dans la dramatique ouverture de son album de 1972, The Rise and Fall of Ziggy Stardust and the Spiders from Mars. Tranchons: il ne nous reste que deux ans. Une occupation vieille de cinquante ans ne peut plus faire machine arrière. Que faire?
D’aucuns espèrent que le chef de l’Union sioniste, Isaac Herzog, prendra la main en tant que ministre des Affaires étrangères. Il ne nous extirpera pas des territoires, non plus qu’il n’amènera la paix ou n’évacuera la colonie d’Ofra. Il convaincra cependant ses homologues européens de lui accorder un délai de grâce afin de poursuivre un processus dénué de sens qui n’aboutira à rien d’autre qu’une perte de temps. Donner à Herzog deux années aux Affaires étrangères nous achèvera.
Certains allèguent que nous devons croire en la santé mentale de la population israélienne et en son désir de paix et de tranquillité, ainsi qu’en notre capacité à la convaincre de soutenir une politique qui mette activement et effectivement en place une solution à deux États – comprenant l’évacuation des implantations autour de la route 60 en Cisjordanie [1] et la division de Jérusalem [2].
NOTE
[1] L’autoroute 60, qui monte de Beer-Sheva au sud d’Israël à Afula au nord du pays, traverse la Cisjordanie par le milieu sur toute sa longueur, à mi-distance donc de la frontière israélienne à l’ouest et de la vallée du Jourdain à l’est.
Elle dessert ainsi Hébron, frôle la Ligne verte à Jérusalem-Est et reprend son parcours médian – passant entre Ramallah et Taïbé, puis à proximité de Naplouse et enfin aux abords de Kabatiya et Djénine, avant de ressortir en Galilée non loin d’Afula.
Les implantations se multiplient sur son tracé ou dans les environs, dont Ofra et Kfar Tapoua’h par ailleurs cités dans cet article.
Voir carte: [->https://www.google.fr/maps/place/Cisjordanie/@32.3672052,35.1495556,11z/data=!4m2!3m1!1s0x151cd5939f3bc783:0x449b6cf65963131e?hl=fr]
[2] L’auteur ne précise pas ici sa pensée, qui rejoint peut-être la solution envisagée à gauche dès les années soixante-dix d’une séparation administrative et politique de Jérusalem permettant à la ville de constituer deux capitales pour deux États sans que s’ensuive une coupure physique – de plus en plus impossible tant les quartiers sont aujourd’hui imbriqués.