Apres les elections, les zelateurs de la « solution du transfert » vont se
renforcer, nous disent les sondages. Peu importe dans quelle mesure ils vont
se renforcer. Le point important est que, chaque jour qui passe, les
precheurs de transfert se sentent de plus en plus autorises a presenter leur
« solution permanente » a l’opinion israelienne.
Aucune loi ne les empeche d’imprimer des milliers de tracts et d’affiches
appelant a l’expulsion d’Arabes, ou pour le formuler comme eux : « Eux
la-bas, et nous ici ». Personne, dans les instance judiciaires, ne montre
d’enthousiasme a les combattre. Aucun procureur general ne leur a interdit
d’emettre leurs « idees » a l’occasion de divers interviews dans les medias,
alors qu’en Europe, on qualifie leurs semblables de termes plus appropries,
comme « fascistes », « racistes », et meme « neo-Nazis ». Les transferistes
cachent peu et montrent beaucoup; ils utilisent un discours lisse pour
parler de « transfert volontaire et accepte », sans s’etendre sur le fait
qu’une telle chose n’existe pas. Ils parlent avec compassion des habitants
des camps de refugies de Cisjordanie et de Gaza, et c’est pour leur bien et
celui de leurs enfants, disent-ils, qu’ils doivent etre reinstalles – a
l’Est du Jourdain. Nos precheurs connaissent bien la detresse des refugies,
car beaucoup d’entre eux ne vivent qu’a un jet de crachat de ces camps, dans
les villas ageablement fleuries des colonies.
Tous les transferistes ne viennent pas des colonies, bien qu’on puisse
supposer que les colons soient sur-represenrtes parmi les electeurs des
partis pro transfert. On peut accuser les colons et leur lobbyistes
d’extremisme, mais ils ne font que pousser jusqu’au bout une logique qui a
ete celle de la politique de colonisation dans les territoires. Cette
politique, fondee sur des ordres officiels emanant de l’armee, et legitimee
par des loi civiles, a pris deux visages : un developpement israelien, et
des limites au developpement palestinien. Ces limites, qu’elles aient pris
la forme d’expropriations de quelque 45% de la Cisjordanie, ou
d’interdictions de construire, comprenaient un element, partiellement cache,
qui consistait a exercer des pressions pour « degraisser » la population
palestinienne. Au cours des annees d’occupation directe, par exemple, il y a
eu des ordres qui ont rapidement conduit a depouiller de leurs droits de
residence les Palestiniens nes en Cisjordanie qui se rendaient a l’etranger.
Les colons du Golan, de la Vallee du Jourdain, de Hebron et d’Ofra etaient
des pionniers qui ont d’abord fait ce que leur ont demande les gouvernements
travaillistes et les instances du mouvement sioniste, et avec leurs
encouragements. Il est temps d’en finir avec le mythe des colons qui se sont
imposes a des gouvernements impuissants. En consequence, si les colons n’ont
ete qu’un fer de lance, aujourd’hui, devant les appels au transfert, ce
n’est pas vers ceux qui crient ces slogans qu’il faut diriger sa colere. Il
faut retenir les lecons du passe. Les zalateurs du transfert reussissent
parce qu’il existe au sein de l’establishment (militaire et ideologique en
particulier) des courants qui les soutiennent. Ils ne font et ne disent que
ce que d’autres pensent.
Il faut poser la question au Parti travailliste, au Meretz, au Shinoui, et
aux moderes qui existent encore au Likoud et au Shas : comptez-vous rester
sur la touche, encourageant par votre inaction les transferistes, qui, eux,
sont plus que jamais mus par des illusions d’essence messianiste et divine?
Refuserez-vous d’inclure dans vos supports de campagne des arguments moraux
contre le transfert, sous pretexte que cela pourrait eloigner certains
electeurs? Les militaires qui garnissent vos rangs vont-ils avertir les
soldats transferistes que toute tentative de mener une operation de
transfert se heurtera a une resistance active?
Vos militants sur le terrain se contenteront-ils d’allumer des bougies et
d’inviter des groupes de rock aux ceremonies de commemoration de Rabin, et
de craindre d’affronter les tranferistes, par peur d’une guerre civile? Les
professeurs de Droit et les historiens, les membres des partis et mouvements
qui sont en faveur de gouvernements moderes, vont-ils rester silencieux
jusqu’a ce que le nettoyage ethnique ait eu lieu?
Ceux d’entre vous qui etes religieux, renoncant a votre judaisme devant une
propagande dont la brutalite ne fait que croitre, rejoindrez-vous ceux qui
« obeissent aux mitzvot » (injonctions de la Totah, ndt), et sanctifient la
terre en meprisant l’etre humain?
Les ecrivains qui ont cueilli les olives avec les Palestiniens vont-ils
accepter cela, et ne pas exiger des autorites chargees en Israel de faire
respecter la loi qu’elles clarifient leur position? Le transfert est-il
indissociablement lie a l’ideologie fondatrice de l »Etat d’Israel, ou
n’est-il qu’un mutant monstrueux, qui ne devrait pas etre autorise a se
dresser contre son createur ?