Trad. : Gérard Eizenberg pour La Paix Maintenant
Depuis que Mahmoud Abbas (Abou Mazen) occupe le poste de Premier ministre
palestinien, Israël a durci ses positions officilelles, et a annoncé très clairement qu’il ne prendra aucune mesure pour lui faciliter la tâche, tant qu’il n’aura pas entamé son combat contre le terrorisme. Ariel Sharon s’en tient à sa doctrine « on ne rase pas gratis », et exige qu’Abou Mazen et son responsable de la sécurité, Mohammed Dahlan, fassent d’abord la preuve de leur volonté de travailler à l’éradication du terrorisme, et démontrent que ce sont eux, et non Yasser Arafat, qui contrôlent l’Autorite palestinienne.
La position de Sharon fait naître un soupçon : que le Premier ministre use de nouveau de manoeuvres dilatoires, susceptibles de faire échec aux efforts actuels pour calmer le conflit et faire repartir les negociations diplomatiques entre Israël et l’Autorité palestinienne. Jusqu’ici, Sharon a réussi à faire échouer tous les plans qui lui ont été proposés (même s’il ne les a jamais rejetés explicitement), en presentant des exigences qui ont empêché tout progrès. Personne n’a oublié son exigence de « sept jours de calme » comme condition préalable à tout progrès diplomatique, ce qui a empêché l’application des plans Tenet et Mitchell.
Qu’Israël insiste pour que le nouveau gouvernement palestinien entreprenne une veritable action pour éradiquer l’infrastructure terroriste, plutôt que de se contenter d’un « cessez-le-feu » des organisations terroristes, est assez logique. Une telle trêve ramènerait le calme, mais permettrait au Hamas, au Jihad islamique et au Tanzim de continuer à exister en tant que milices armées et d’exploiter le cessez-le-feu pour se renforcer dans l’optique d’une reprise du conflit. Cependant, Israël pourrait prendre un certain nombre de mesures qui aideraient Abou Mazen à affirmer son pouvoir et à acquérir une légitimité, conditions nécessaires pour faire la guerre au terrorisme. Il serait possible de faire des gestes et de démontrer un désir que les negociations progressent, sans pour cela mettre en danger la
sécurité d’Israël, et sans même stopper les operations de Tsahal destinées à
prévenir les attentats terroristes.
Un exemple de ces mesures pourrait être l’évacuation des avant-postes illégaux établis en Cisjordanie. Le fait qu’Ariel Sharon et Shaul Mofaz, ministre de la Defense, renâclent a le faire ne tient pas à des considérations de sécurité. Les retards apportés, les discussions sans fin et les tentatives de légaliser rétroactivement quelques-uns de ces avant-postes prouvent que le gouvernement craint l’affrontement avec les colons et avec la droite, et qu’il préfère que les avant-postes fassent partie des éléments de la négociation.
L’expérience montre que Sharon a tendance à faire des gestes et à faciliter la vie des Palestiniens quand il est soumis à la pression des Etats-Unis, ou qu’il se prépare à un voyage à Washington. En de telles occasions, il arrive souvent qu’Israël étende les zones de pêche autorisée à Gaza, lève certainesdes restrictions imposées à la circulation des biens et des personnes, ou expose des projets comme par exemple un « plan Marshall » pour l’économie palestinienne.
Soumis à de fortes pressions américaines, Sharon a même accepté de restituer à l’Autorité palestinienne des sommes gelées provenant d’impôts collectés par Israël. Mais après la photo en première page avec George W. Bush, on en revient en général au statu quo ante.
Alors que la date de sa huitième rencontre avec Bush approche, il est probable que Sharon prendra des mesures pour faciliter la vie dans les territoires, et même qu’il fixera une date de rencontre avec Abou Mazen. Cela, malheureusement, ne suffit pas. Israël doit aspirer à un accord avec les Palestiniens, et pas seulement pour calmer l’administration américaine jusqu’a la prochaine crise. Il doit tendre la main à Abou Mazen et souhaiter son succès, afin que se renforcent les modérés du côté palestinien.