Trad. : Tal Aronzon pour La Paix Maintenant
Dans le feu des négociations avecle Likoud et le Parti national religieux (PNR) à propos du caractère religieux de l’Etat, les négociateurs du Shinoui ont oublié d’aborder avec leurs partenaires potentiels le futur de l’Etat sioniste et démocratique.
Le futur n’est plus une question philosophique ou académique. La question de
savoir si une minorité juive peut dominer une majorité arabe va devenir un
problème existentiel au cours de cette législature. Mais en dépit de toutes
les données démographiques qui montrent que dans dix ans, le nombre d’Arabes
vivant entre la mer et le Jourdain dépassera celui des Juifs, les élus balaient le problème sous le tapis. Alors que toutes les « feuilles de route » s’accordent sur une date butoir pour une solution (c’est-à-dire la fin de l’occupation) vers la fin de 2005, soit au milieu de la législature en cours, les élus du centre travaillent main dans la main avec les élus du Grand Israël.
L’approche « nous traverserons le pont quand nous y serons », qui a caractérisé ces dernières années les négociations en vue de former une coalition, n’a plus cours. Nous sommes sur le pont, et il s’écroule. Les Cassandre de gauche ne sont plus seuls à avertir qu’éviter de prendre une décision concernant les frontières du pays équivaut à une malédiction pour les générations à venir.
En mars dernier, Dan Meridor, un des descendants de la famille révisionniste
(parti de Begin, fondé par Jabotinsky, ndt), disait déjà que le problème
démographique/démocratique « n’est pas d’un abord agréable, mais de toutes les grandes questions (sécuritaires, politiques et autres), il s’agit d’une menace immédiate que nous ne pouvons éviter ».
Et dans une anthologie publiée récemment par le Truman Institute, Meridor
continue en disant que dans trois ou quatre ans, au lieu de parler d’un Etat
palestinien, ils (les Palestiniens) diront : « pas besoin de tirer, il suffit de voter ».
Meridor travaille également sur la meilleure solution pour Israël. Il rejette les idées de ses collègues de droite. Apres avoir rejeté l’idée du transfert, « immorale et impraticable », Meridor se penche sur l’hypothèse selon laquelle les Palestiniens se contenteraient d’une autonomie et voteraient en Jordanie. Et de citer Menahem Begin, qui a dit en décembre 1977 : « Nous ne serons pas la Rhodésie … même l’Afrique du Sud n’a pas réussi avec cette approche. »
Cela conduit Meridor à la solution la meilleure : la crétion d’un Etat palestinien, avec ou sans accord. Il ne se contente pas de vagues déclarations, et dit « Evidemment, pour le bien de la paix, nous ne pouvons laisser 20 enclaves. Il doit y avoir une continuité territoriale. »
Meridor, qui était présent à Camp David en 2000, peut témoigner qu’il existait de la part des Arabes une acceptation du fait que « les zones de colonisation juive massive demeureront en Israël, mais pas les zones où la population juive y est peu dense. »
En privé, Meridor admet qu’il ne sait absolument pas si Sharon veut parler des « zones à population juive peu dense » quand il parle de « concessions douloureuses ». Sharon a chargé Meridor de formuler la « feuille de route » d’Israël, mais l’ancien ministre ne peut dire si l’engagement de Sharon en faveur de Netzarim n’est qu’un stratagème servant aux negociations, intérieures ou diplomatiques. Il ne sait pas si, l’heure de vérité venue, Sharon rangera dans les tiroirs son idée creative, nommée « continuité de transport », qui offre aux Palestiniens des ponts et des tunnels pour circuler entre leurs zones. Entre temps, au nom de la sécurité, Meridor soutient le gouvernement.
Le fait que Sharon renonce aux travaillistes et perpétue l’alliance avec le PNR est une indication de la direction qu’il veut prendre. Mais au cours des négociations entre le Likoud, le Shinoui et le PNR, un problème non moins inquiétant a été mis a jour : un parti d’avocats, fier d’avoir reçu les suffrages de partisans de La Paix Maintenant, a trouvé un terrain d’entente avec un parti dont la direction se tient aux côtés des colons delinquants. Halleluia! Tommy Lapid (Shinoui) et le rabbin Yitzhak Levy sont parvenus à un accord sur la question des rapports entre la religion et l’Etat. Moins de dix ans après la signature des premiers accords avec les Palestiniens, nous sommes revenus aux temps où les Israéliens négocient entre eux. Au diable le sionisme, au diable la démocratie, ce qui compte, c’est que les centres commerciaux soient ouverts le samedi.