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Yediot Aharonot, 8 octobre 2006

Trad. : Gérard Eizenberg pour La Paix Maintenant


La seconde guerre du Liban a soulevé de nombreux doutes sur la capacité du gouvernement à réfléchir à l’avance aux conséquences de ses actions, à analyser leurs répercussions futures et à agir en conséquence. Mais le comportement du gouvernement à l’égard des Palestiniens atteste sans aucun doute des capacités de planification stratégique d’un joueur d’échecs émérite qui, patiemment, tend un piège à son adversaire , coup après coup, jusqu’à la défaite du Roi. Echec et mat.

En fait, il ne serait pas exagéré de dire que ceux qui sont les moins surpris par les heurts sanglants entre le Hamas et le Fatah dans les Territoires sont les mêmes hommes politiques qui ont été prompts à décider que « pour le moment, l’agenda palestinien est mort », un avis de décès qui mettait fin aux perspectives de pourparlers avec l’autre côté.

Israël peut continuer à parler du chaos en Palestine comme d’une « affaire intérieure palestinienne » et à se présenter comme non impliqué, mais cette dangereuse confrontation découle d’une politique israélienne qui a consisté à affaiblir aussi bien le Fatah que le Hamas, afin qu’aucun des deux ne puisse administrer les Territoires de façon efficace.

Du jour où il a été élu président, Mahmoud Abbas a été traité par Israël de personnalité vide, faible et impuissante, ce qui a pavé la voie à sa défaite aux élections législatives et à la prise du pouvoir par le Hamas. L’exemple le plus frappant de cette politique a été bien entendu le refus par Israël de coordonner son retrait de la bande de Gaza avec le gouvernement palestinien, qui ne comprenait pas à l’époque le Hamas, optant pour une mesure unilatérale : brillante manoeuvre israélienn, qui a évité au gouvernement de prendre en compte le côté palestinien, virtuel à ses yeux.

Comme nous le savons, la politique du « il n’y a pas de partenaire » n’a pas été inventée en l’honneur du Hamas, mais avec l’accession au pouvoir du mouvement islamiste, cette politique a pris un virage encore plus actif. Non seulement nous refusons de parler à ce non-partenaire, mais nous employons tous les moyens possibles pour le défaire, y compris l’enlèvement de ses représentants élus et la privation de nourriture de ses électeurs.

Un jeu soigneusement orchestré

Et même quand il semble que, pour un moment, le Hamas perde un peu de sa popularité auprès des Palestiniens et que la position d’Abbas puisse de nouveau se renforcer, Israël s’assure de faire prisonnier le commandant de la Garde présidentielle, assénant ainsi un nouveau coup dans les côtes d’Abbas, et ainsi de suite. En ce moment, il est à la mode de remplacer le slogan « pas de partenaire » par « il faut renforcer Abbas ». Mais il s’agit d’une sinistre plaisanterie. A Jérusalem comme à Washington, on sait que c’est trop peu, et surtout trop tard.

Ce jeu, soigneusement orchestré par Israël, a aussi un décor, appelé la bande de Gaza. Depuis un an que le désengagement a eu lieu, Israël a fait en sorte de faire de la bande de Gaza une cocotte-minute, en attendant que l’explosion se produise. Avec le chômage qui atteint des sommets, un siège terrestre, aérien et maritime, des passages frontaliers la plupart du temps fermés, avec un siège économique et le gel des transferts des produits de douane et de taxes qui appartiennent de droit à l’Autorité palestinienne, le gouvernement israélien savait que ce n’était qu’une question de temps avant que la bande de gaza ne s’effondre en un chaos violent – ce qui n’a pas manqué d’arriver. Aujourd’hui, le gouvernement peut cocher l’objectif défini auparavant.

Toutefois, il faudrait rappeler à ceux qui se réjouissent de voir les Palestiniens s’entretuer en ce moment que ce jeu comporte un épilogue. Le jour venu, peut-être plutôt que prévu, les Palestiniens chercheront à faire cesser ce bain de sang et à s’unir autour d’un objectif commun.

Alors, aucun objectif ne sera mieux capable d’unir autour de lui les factions palestiniennes que la résistance à l’occupation. Ainsi, Israël se prépare, de ses propres mains et avec une évidente satisfaction, une troisième Intifada, avant même que la deuxième ne soit morte, et ce pour nourrir la théorie du « il n’y a pas de partenaire ».