Ha’aretz, 18 février 2008
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Traduction : Gérard Eizenberg pour La Paix Maintenant
Dans une interview récente accordée à l’hebdomadaire britannique The Jewish News, le rabbin en chef de la communauté ashkénaze a déclaré que les musulmans qui prient à la mosquée Al-Aqsa devaient reconnaître que Jérusalem n’appartient qu’aux juifs. Les musulmans, avait-il dit précédemment, disposent déjà de La Mecque et de Médine, et n’ont donc pas besoin d’un troisième lieu saint. Au cours de la même interview, le rabbin Metzger a même suggéré l’idée de créer un Etat palestinien dans le désert du Sinaï, et d’y déplacer les habitants de Gaza.
Cette position religieuse extrémiste s’expose aussi tous les jours sous la forme de menaces à l’égard du gouvernement Olmert de la part du parti Shas, pour lequel toute expression du gouvernement sur l’éventualité d’une division de Jérusalem serait suivie immédiatement d’un départ de la coalition gouvernementale du parti ultra-orthodoxe. Cette menace se fonde sur une hypothèse dangereuse : pas une seule pierre de Jérusalem de doit être divisée entre les deux peuples, car la ville n’est sacrée que pour les juifs.
Il est honteux qu’un rabbin en chef d’Israël, qui touche un salaire de l’Etat, prenne la responsabilité de transformer un conflit politique en un conflit religieux. Au lieu de s’en tenir au principe de l’autodétermination pour les deux nations, Metzger adopte une position qui, dans le principe, est identique à celle du Hamas, qui revendique tout le territoire de la Palestine mandataire pour les musulmans. Ainsi, le rabbin contribue à transformer un conflit politique entre 6 millions de Juifs et 5 millions de Palestiniens en un conflit avec un milliard de musulmans.
L’ancien ministre Natan Sharansky avait, lui aussi, tenté de faire obstacle à un partage de Jérusalem, mais par d’autres moyens : il avait suggéré que la responsabilité de cette décision politique soit transférée au peuple juif. Il ne proposait pas seulement aux juifs de la diaspora de participer au débat public, mais de leur donner un véritable droit de vote sur le sort de Jérusalem. L’hypothèse sous-jacente était que les juifs de la diaspora, affolés à l’idée d’un éventuel partage de Jérusalem, voteraient contre, sans pour cela risquer leur vie en y habitant.
Chacun sait qu’au bout du compte, il n’y aura pas d’autre choix que de diviser Jérusalem en deux capitales, l’une israélienne et l’autre palestinienne. Mais faire de cette tension déjà considérable sur les plans religieux et national un Armageddon qui enflammerait tout le monde religieux est un acte irresponsable.
David Ben-Gourion, qui avait prévu de dilemme depuis longtemps, avait déclaré lors de son dernier discours public, en 1973, qu’il était prêt à céder Jérusalem-Est en échange de 100 années de paix, ces 100 années étant nécessaires pour faire du peuple juif une nation. Ben-Gourion avait compris ce que Metzger, le rabbin Ovadia Yossef [chef spirituel du parti Shas, ndt] et les religieux extrémistes et jusqu’au-boutistes refusent de comprendre : à Jérusalem, seul marchera un compromis politique déconnecté des conflits religieux. Les rabbins extrémistes et les leaders ultranationalistes d’Israël qui refusent d’admettre cette réalité nous mènent au bord du précipice. Ils feraient bien de faire preuve d’un peu de responsabilité, et au moins, de garder pour eux leur opinion, au lieu de rallumer sans cesse ce cocktail Molotov qui a pour nom Jérusalem.