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Ha’aretz, 9 octobre 2006

Trad. : Gérard Eizenberg pour La Paix Maintenant


La phrase clé du discours d’Ismail Haniyeh, premier ministre de l’Autorité palestinienne, devant la foule de ses partisans réunis à Gaza ce week-end a été : « Ne désespérez pas! Le Hamas dirigera le prochain gouvernement. » Mais si l’on examine le contenu de son discours, les premiers signes de désarroi et de désespoir apparaissent. Un conte oriental explique pourquoi, lorsque le fer frappe le fer, cela fait beaucoup de bruit, mais lorsque le fer frappe le bois, on n’entend rien. La raison en est que quand le fer frappe le fer, le fer hurle de douleur car il est frappé par son frère, la chair de sa chair. Ce qui n’est pas le cas du bois, qui lui est étranger.

Vus sous cet angle, certains passages du discours de Haniyeh sont intéressants. Il s’est plaint du fait que les grandes puissances, emmenées par les Etats-Unis, combattent son gouvernement depuis sa création. Faisant clairement allusion au président Mahmoud Abbas et au Fatah, il a ajouté qu’à son grand regret, il y a des complices au sein du camp palestinien. Haniyeh s’est montré encore plus clair à l’égard de ses frères, les gouvernements arabes. Depuis la victoire de son parti, aucun gouvernement arabe ne l’a invité, à part le Qatar.

Il semble que ce soit la trahison des frères arabes qui soit la plus douloureuse. Un journaliste de Gaza affirme avoir aussi entendu Haniyeh se plaindre du fait que, ces derniers mois, Mahmoud Abbas ait voyagé aux quatre coins du monde, sans avoir jamais pris la peine d’emmener avec lui un représentant du gouvernement Hamas. Bien qu’à ma connaissance, aucun grief de ce genre n’ait été publié dans la presse palestinienne, cela a peu d’importance. L’image qui émerge des plaintes de Haniyeh est que, pour la première fois depuis sept mois, il semble avoir un peu peur.

Dans une publication palestinienne de la semaine dernière qui citait Haniyeh, celui-ci aurait dit que les perspectives étaient sombres. Dans le meilleur des cas, aurait-il dit, Gaza et l’Autorité palestinienne sombreront dans l’anarchie, et au pire, une guerre civile éclatera.

Haniyeh a de bonnes raisons d’être de mauvaise humeur et de prédire le pire. Il apparaît que le siège imposé par Israël et par d’autres Etat, y compris par les Etats arabes et le Fatah (rival palestinien du Hamas) n’a pas réussi à modifier les positions idéologiques du Hamas, qui reposent sur le socle de l’islam radical. Des sondages récents en Cisjordanie et à Gaza montrent un affaiblissement du Hamas, et l’opinion palestinienne semble adresser un message au Hamas : Nous vous avons élus pour mener des réformes de gouvernance et pour montrer de la fierté et de la détermination face à Israël, mais pas pour transformer la Palestine en une annexe de l’Iran.

Dans ce contexte, les remarques, ou les menaces d’Abbas envers le Hamas apparaissent aujourd’hui plus claires. Le monde entier soutient Mahmoud Abbas, et lui conseille de dissoudre le gouvernement Hamas, de déléguer la formation d’un nouveau gouvernement à une personnalité neutre et de déclarer que de nouvelles élections auront lieu l’année prochaine. Et tout le monde affirme qu’il est indispensable de le renforcer.

Il est peu probable que cela convainque le Hamas de renoncer facilement. L’une des réactions que pourrait choisir la direction du Hamas en cas de dissolution du gouvernement pourrait être d’arrêter de respecter la trêve et de se lancer dans une campagne d’attentats contre Israël : elle en a les moyens et la capacité. Il est aussi possible que cela explique la diffusion il y a deux jours dans les émirats du Golfe d’une cassette vidéo revendiquée par des cellules d’Al Qaïda en Palestine, où il y a des menaces d’exécuter tout officier palestinien qui agirait en tant qu’ennemi du peuple. Dans cette cassette, les dirigeants revendiquent l’assassinat de l’officier palestinien Jad al-Taya et de quatre de ses subordonnés il y a trois semaines à Gaza, ainsi que la tentative d’assassinat, il y a quatre mois, du chef du renseignement palestinien à Gaza, le général Tarq Abou Rajan.

Il est difficile de discerner un quelconque élément politique capable de prendre le dessus sur Hamas et de le remplacer à la tête du gouvernement. La direction du Fatah est démembrée, et il n’existe pas le début du commencement des réformes promises au sein du mouvement. Les querelles entre ancienne et nouvelle gardes n’ont jamais cessé. La situation qui pourrait émerger après la chute éventuelle du Hamas pourrait être encore pire.