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Yediot Ah’aronot, 21 juillet 2005

L’Etat de Yesha [[Yesha acronyme pour les mots « Yehouda » (Judée), « Shomron » (Samarie) et « ‘Aza » (Gaza). Le Conseil de Yesha est le conseil représentatif des colons des Territoires occupés]]
Par Yaron London

Trad. : Gérard Eizenberg pour La Paix Maintenant


Là-bas, en Cisjordanie, un pays s’est développé, avec ses propres lois, qui s’est séparé de la nation mère par ses coutumes et par ses croyances.
Ce pays possède son propre système éducatif, ses mouvements de jeunesse, son ministre des Finances, ses héros, ses colonies et sa langue propre.
Israël demande à ce pays qu’il obéisse à ses lois. Or, non seulement il les viole, mais il présente ses propres exigences, demandant de la nation mère qu’elle renonce à une part de sa souveraineté.
Comme tous les Etats agressifs, Yesha se présente comme porteur de paix, et exige de pouvoir se révolter, sans quoi ses extrémistes recourraient à une violence fatale.

Une langue différente

La langue de ce pays étranger fait partie de la famille des langues sémitiques, et ressemble beaucoup à l’hébreu.
Mais les mots ont un sens différent.
Prenez par exemple l’expression :  » tentative de faire échouer les décisions d’un gouvernement élu ». Cela donnera : « manifestation non-violente ». Exiger de « reconnaître la violation de la loi comme une forme légitime de protestation » devient « de la démocratie », et « révolution » se traduit par « obéir aux commandements de la Torah », tels qu’ils sont compris par des rabbins d’ailleurs payés par la nation mère.
Une « violation en masse d’une zone militaire fermée », c’est en réalité « aider nos frères héroïques du Goush Katif », et les « officiers de Tsahal » sont des « salauds de soldats qui ont troqué leurs principes contre de l’argent et des promesses d’avancement ».
« Déménager des gens à une courte distance de leurs maisons, avec des indemnités généreuses en dédommagement de l’inconfort ainsi créé » est un « transfert ». Un « beau quartier dans l’un des endroits les plus agréables d’Israël » est un « camp fermé », « Knesset » signifie « antre de la corruption », et « gouvernement » veut dire « la mafia de Sharon ».

Les Cassandre de gauche avaient raison

Les vieilles prédictions du camp de la gauche anti-occupation sont en train de se réaliser sous nos yeux : l’Etat colon a fini par devenir extrêmement puissant, et au moment de vérité, il se révolte contre l’Etat d’Israël.
On pouvait s’y attendre, car c’est ce qui s’est produit dans d’autres pays qui ont établi des colonies, comme l' »Algérie française » qui a tenté de renverser la République.
Comme les colons d’Algérie, nos colons ont développé leurs intérêts propres, en contradiction avec ceux de la nation mère. Ils se sont institués en autonomie, prétendent protéger l’intérêt national au sens large, accusent le pouvoir central de trahison et encouragent l’armée à se rebeller.
Comme les colons français d’Algérie, les gens du Yesha affirment qu’au lieu de négocier avec des musulmans, il faut « laisser l’armée gagner », et leurs extrémistes appellent à s’en prendre à des musulmans afin que la totalité de l’énergie de la nation soit utilisée à empêcher les attentats de masse.
De plus, leur rapport au dirigeant élu d’Israël, un officier de carrière charismatique qui les a déçus, ressemble assez au cas français. Bien sûr, nous n’avons pas encore découvert de projet clandestin dont l’objectif soit de tuer des représentants du gouvernement, mais nous nous attendons à ce que cela arrive.

Ici comme en France naguère : nous devons manifester, en appeler sincèrement à l’unité et à la responsabilité nationales. Ce serait une faiblesse que de reconnaître à nos voisins le droit à exister. Nous ne devons pas laisser nos voisins de Yesha créer l’Etat de Yesha.