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The Forward, 6 fevrier 2004


D’apres certains diplomates et journalistes, les pays arabes moderes sont de
plus en plus inquiets d’un possible effondrement de l’Autorite palestinienne
(AP). L’Egypte et la Jordanie ne cachent pas que l’etat critique de l’AP,
combine a ce qui parait un desengagement americain pendant une annee
electorale et aux plans du gouvernement israelien pret a prendre des mesures
unilaterales dans les territoires, pourrait conduire a une prise du pouvoir
par le Hamas.

« Je n’ai jamais vu l’AP dans un tel chaos », dit Edward Abbington, lobbyiste
de l’AP a Washington. « Ils sont proches de l’effondrement, et les Etats
arabes comme l’Egypte et la Jordanie sont inquiets des consequences a long
terme, en particulier de la montee du Hamas… Ils sont frustres de
l’inaction de l’AP ».

Le general Aharon Zeevi Farkash, chef des renseignements militaires
israeliens, a dit au conseil des ministres cette semaine qu’Arafat se
rendait compte que la situation actuelle affaiblissait son parti du Fatah au
profit du Hamas.

Pour reaffirmer son autorite, a dit Zeevi, Arafat a recemment donne l’ordre
aux officiers de police de l’AP de retourner dans les rues des villes
palestiniennes. Mais cette mesure a souffert immediatement du fait que
l’auteur de l’attentat suicide qui a tue 11 civil dans un bus de Jerusalem
la semaine derniere etait un policier de l’AP de Bethleem.

De plus, des representants palestiniens ont exprime leur amertume face au
fait qu’Israel a accepte de liberer des prisonniers palestiniens dans le
cadre d’un accord avec le Hezbollah, apres l’avoir refuse quelques mois
auparavant quand le Premier ministre palestinien d’alors, Abou Mazen,
l’avait reclame. Cela a ete percu dans la rue palestinienne comme un coup
porte a l’AP.

Plusieurs intellectuels et conseillers politiques palestiniens ont recemment
publie des articles blamant l’AP pour son apathie.
Dans un article paru dans le journal Al-Sharq al-Awsat, base a Londres,
l’ancien conseiller d’Arafat Imad Shakur s’en est violemment pris a Arafat
pour son manque de leadership et a exige des mesures immediates et
spectaculaires pour retablir la loi et l’ordre dans les territoires
palestiniens.

Ces dernieres semaines, des representants egyptiens ont pousse Arafat a
lutter contre l’anarchie rampante qui regne dans les territoires. Selon le
journaliste israelien Alex Fishman de Yediot Aharonot, le ministre egyptien
des Affaires etrangeres Ahmed Maher et le chef du renseignement Omar
Suleiman se sont rendus plusieurs fois a Ramallah et a Jerusalem, et ont
sermonne Arafat qui, d’apres eux, n’affirme pas assez son autorite.

Le Caire a abrite pendant plusieurs mois des pourparlers inter-palestiniens,
dans l’espoir de parvenir a un cessez-le-feu, sans reel succes.

La Jordanie craint particulierement que l’AP s’effondre et que la
construction de la cloture de securite provoque un exode massif de
Palestiniens vers le royaume hachemite. Ces craintes contribuent a expliquer
pourquoi Amman a ete aux premiers rangs de la lutte juridique pour porter le
probleme de la cloture devant la Cour internationale de Justice de La Haye,
provoquant ainsi la colere d’Ariel Sharon.

Amman pousse egalement les Etats arabes a reaffirmer leur engagement
vis-a-vis de l’initiative saoudienne, a l’occasion d’une prochaine reunion
de la Ligue arabe en Tunisie. Le plan saoudien appelle a une reconnaissance
totale d’israel de la part du monde arabe, en echange d’un retrait israelien
total des territoires occupes.
Il est question d’y introduire certaies modifications de vocabulaire afin de
susciter une reaction plus positive de la part de Jerusalem, sur le probleme
des refugies, sur les garanties de securite ou sur une condamnation claire
des attentats suicides.

Un diplomate occidental a dit qu’il existait des pourparlers entre Etats
cles, europeens et arabes, pour trouver un moyen de s’assurer qu’il y aurait
un interlocuteur credible du cote palestinien.

Un signe clair du declin du soutien arabe a l’AP peut etre trouve dans la
baisse des engagements financiers.
« On percoit une absence d’autorite », dit un representant des Nations Unies.
« Les financements internationaux dont beneficiait l’AP se reduisent au
minimum, et cela pourrait signifier la fin de l’AP ».
Par exemple, les Etats arabes sont de plus en plus reticents a repondre aux
appels de fonds d’urgence emanant de l’UNRWA (agence des Nations Unies en
charge du probleme des refugies).
Le Premier ministre palestinien, Abou Ala, semble preparer une visite de
levee de fonds en Europe, a dit un observateur.

Plusieurs colombes ont exprime leurs craintes face a un possible
demantelement de l’AP.
« Apres trois ans et demi d’intifada, la capacite de l’AP a gouverner est
extremement limitee », dit Lewis Roth, vice-president d’APN (Americans for
Peace Now), qui cite comme principaux facteurs les operations israeliennes
et les constantes attaques contre l’AP, la lassitude des bailleurs de fonds
et l’incompetence traditionnelle de l’AP.
Les representants israeliens rejettent l’idee qu’Israel soit le principal
responsable du declin de l’AP, arguant du fait qu’Arafat a commis une erreur
strategique en ne luttant pas contre le terrorisme et en ne prenant aucune
mesure pour reformer l’AP.

Pour Lewis Roth, la situation redevient celle qui prevalait avant Oslo,
quand ‘il n’existait aucun interlocuteur central du cote palestinien, et
quand les accords de securite se prenaient a un niveau extremement local ».

Un representant israelien reconnait l’existence d’une vacance du pouvoir, et
la possibilite que ce vide soit rempli par le Hamas.
« Pas besoin d’etre un genie politique pour s’imaginer que, lorsque l’entite
centrale au pouvoir decide de ne plus gouverner, il y aura quelqu’un d’autre
pour remplir ce vide », dit ce representant, en ajoutant que les Palestiniens
ont atteint une situation ou le Hamas constitue aujourd’hui une « menace
directe contre l’AP ».
Ce meme representant reprend les craintes jordaniennes d’un Etat palestinien
profondement instable, qui mettrait en danger ses deux voisins :
« Le probleme, evidemment, est que la Palestine emergeante donne tous les
signes d’un Etat en situation d’echec, et qu’alors nous pourrions tres bien
avoir un voisin qui ressemble davantage a la Somalie qu’a la Jordanie. Et
cela serait pire que la Somalie, du fait des sources inherentes d’une
instabilite politique perpetuelle, due a un combat sans fin pour les
frontieres de l’ex Mandat britannique ».