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Yediot Aharonot, 12 décembre 2006

Trad. : Gérard Eizenberg pour La Paix Maintenant


Il y a quelques jours, je suis revenu d’une visite au sud des Etats-Unis, dans la région appelée la « ceinture de la Bible  » (« Bible Bealt »). Cette région immense s’étend de la Louisiane au Nouveau Mexique et est remplie de croyants et d’églises évangéliques qui constituent l’épine dorsale de l’actuelle administration américaine.

Impossible d’échapper aux panneaux géants appelant à soutenir Israël, ni aux programmes de la radio et de la télévision où des prêcheurs en costumes d’hommes d’affaires et au cheveu fraîchement taillé appellent tout à la fois à croire en Jésus et à soutenir l’Etat juif. Vraiment, une vague d’amour inconditionnel pour nous, qui vivons en Terre Sainte.

En apparence, où est le problème? Mais, en grattant légèrement la surface de cet amour, nous découvrons qu’il s’agit d’une sorte d’amour qui dépend beaucoup de quelque chose. Et ce « quelque chose » est la croyance chrétienne fondamentaliste en la seconde révélation de Jésus, qui se produira évidemment à Jérusalem à la suite de l’Armageddon (la guerre de Gog et Magog).

En d’autres termes, l’existence de l’Etat juif constitue pour ces gens la preuve de l’existence de Dieu et la validité de l’Ancien Testament, dans lequel il a promis à Abraham que cette terre serait donnée à sa descendance.

Pour cette même raison, ces chrétiens fondamentalistes rejettent le moindre retrait d’Israël de ses frontières bibliques, frontières promises par Dieu. Bonne raison pour, après les conférences données dans les églises du sud des Etats-Unis, encenser nos propres fondamentalistes qui sacralisent chaque site et chaque tombe de cette terre. Des deux côtés, on accepte la Bible comme le seul manuel valable sur le front politico-diplomatique.

Mais les chrétiens fondamentalistes ont aussi le Nouveau Testament, auquel ils croient de tout leur coeur, et selon lequel Jésus se révélera à nouveau à ses adeptes après une guerre terrible. Alors, il nous proposera à nous, les juifs, le choix ultime : l’accepter en tant que Messie et être récompensés par la vie éternelle, ou le rejeter, comme nous l’avons fait dans le passé, et être damnés pour l’éternité.

Nous, juifs d’Israël, sommes donc considérés par ces chrétiens fondamentalistes comme des chrétiens en puissance, à qui pourrait être offerte très bientôt la chance de leur vie : la possibilité de se repentir et de croire en Jésus à la fin de la guerre la plus terrible que le monde aura connue. Les musulmans, eux, ne sont de toute façon pas des candidats à la rédemption et sont condamnés à la mort et à l’enfer. Mais nous, nous pourrions gagner le salut éternel.

Où intervient la bombe iranienne

Il fut un temps où j’ai cru que l’alliance entre les Etats-Unis et Israël était un pacte entre démocraties occidentales qui défendaient un système de valeurs libérales et éclairées : les Américains le font de par le monde, et nous au Moyen-Orient.

Mais la situation a changé. Cette alliance se fait entre fondamentalistes, et non entre démocrates. Un pacte entre ceux qui sacralisent la terre et ceux qui sacralisent Jésus. Une alliance entre ceux qui dansent sur la tombe de Rahab la prostituée à Jéricho et ceux qui croient à la révélation du Messie, en extase et les yeux fermés.

Et cette alliance englobe les fondamentalistes iraniens qui veulent détruire Israël avec une bombe atomique. Quand j’ai demandé à un certain nombre de croyants chrétiens quelle était leur position sur l’Iran, ils m’ont tous donné la même réponse : c’est le début de la Guerre de Gog et Magog.

La bombe atomique qui tombera sur nous sera l’annonce de la venue du Messie. En conséquence, non seulement ils ne voient pas d’objection à cette bombe, mais ils voient les Iraniens comme une sorte de serviteurs de Dieu dont la mission serait de commencer cette horrible guerre – dont l’issue, comme nous l’avons rappelé, est claire.

On peut traiter de ces sujets avec mépris, mais rappelons-nous : ces croyants, dont le nombre est énorme, sont le pilier de l’administration Bush. Ce sont eux qui dictent la politique du président, y compris sa politique étrangère.

On peut maintenant comprendre pourquoi Washington adopte une politique d’attente concernant le conflit du Proche-Orient. Après tout, si ce conflit a été commandé par le Ciel et si son issue est connue, pourquoi intervenir?

Les Américains sont une chose, mais pourquoi sommes-nous entraînés dans cette politique? La ministre des affaires étrangères Tzipi Livni a raison de dire que le conflit dans notre région est entre les fondamentalistes et les modérés. Le problème, c’est que depuis longtemps, nous ne sommes plus du côté des modérés, mais du côté des fanatiques et des fondamentalistes.

Chaque jour qui passe et où nous continuons à ne rien faire au lieu de proposer des initiatives nouvelles et audacieuses, nous rapproche de la rédemption chrétienne. Préparez-vous à la venue du Messie. Quel messie? Cela dépend à qui on pose la question.