[->http://www.ynetnews.com/articles/0,7340,L-3280453,00.html]
Yediot Aharonot, 24 juillet 2006
Trad. : Gérard Eizenberg pour La Paix Maintenant
Les généraux ont parlé. En fait, tous les généraux, passés (ça, c’est certain), présents et futurs. Mais je ne suis pas convaincue.
Oui, nous avons tous les droits de réagir à une violation de notre frontière internationalement reconnue, en particulier depuis que nous nous sommes retirés totalement du Liban il y a six ans. Et, oui, nous avons tous les droits de réagir aux attaques de roquettes Qassam contre les civils au sud.
Mais ce qui est important, en tout premier lieu, c’est la manière de réagir. Les deux cas sont distincts : le Liban est un Etat souverain ; l’Autorité palestinienne est tout sauf souveraine. L’attaque depuis le Liban s’est produite sans aucune provocation de notre part ; les Qassam font partie du cycle de violence de l’occupation, avec les assassinats ciblés et autres.
Punitions collectives
Mais dans les deux cas, la réaction (et la contre-réaction) a été de punir collectivement des populations civiles. Dans les deux cas, l’objectif tel qu’il apparaît (et tel qu’il a été défini par de nombreux commentateurs ex-militaires que nous subissons) d’infliger aux populations locales une punition collective suffisante pour qu’elles fassent pression sur leurs gouvernements afin que ceux-ci fassent ce qu’elles veulent qu’ils fassent.
Dans le cas de Gaza, l’objectif est d’attaquer les lanceurs de roquettes et peut-être aussi de faire tomber le gouvernement du Hamas. Au Liban, il s’agit d’obtenir de l’armée libanaise qu’elle se déploie au sud afin d’éjecter ou de désarmer le Hezbollah.
Ces objectifs peuvent-ils atteints autrement ? Peuvent-ils être atteints par les moyens que nous utilisons aujourd’hui ? Quel but notre réaction poursuit-elle ?
La ligne a été franchie
En ce moment, notre réaction s’adresse à la frustration et à l’indignation de l’opinion israélienne, en particulier de celle qui se trouve sous le feu. Elle s’adresse aussi à l’orgueil terni de Tsahal (et peut-être celui du gouvernement), sous l’apparence d’une volonté de restaurer notre capacité de dissuasion. Celle-ci, oit dit en passant, ne marche plus depuis des années, peut-être même des décennies, si elle a jamais marché. Pour telle ou telle raison, les Arabes ne semblent pas comprendre que nous attaquer ne paye pas.
Mais l’utilisation massive de la force israélienne a probablement déjà franchi la ligne, non seulement de ce qui pourrait être considéré comme justifié, mais aussi de l’efficacité. Le bombardement des infrastructures du Liban, la démolition de certaines parties de Beyrouth et d’autres villes, sans parler de la destruction de la plus grande partie du sud et la mort de plus de 300 Libanais, la plupart civils, ont fait très peu pour renforcer l’opposition des chrétiens et des sunnites face au Hezbollah.
La colère des Libanais s’est tournée contre l’assaillant, Israël, et la solidarité a remplacé, au moins provisoirement, les inimitiés confessionnelles traditionnelles. A Gaza, la voix modérées des partisans de Mahmoud Abbas et de ceux qui, au sein du Hamas, soutiennent le programme de réconciliation nationale du document des prisonniers, ont été réduites au silence par les chars et les avions israéliens, au profit des éléments du Hamas les plus radicaux qui siègent à Damas.
Pas de réponse militaire
Cela entraînera-t-il la libération des soldats israéliens ? Cela stoppera-t-il les tirs de Qassam depuis Gaza et les rares attaques (par le passé) depuis le sud Liban ?
Encore une fois, les généraux nous disent qu’ils se rendent compte que la réponse est non. Les Qassam continuent, et reviendront même s’ils sont provisoirement stoppés. Le Hezbollah ne peut pas être définitivement détruit.
Concernant les soldats, comme pour le cas des attaques armées, seules des solutions politiques provoqueront les résultats escomptés. Un échange de prisonniers, peut-être, et une force internationale pour renforcer l’armée libanaise, peut-être. C’est le maximum que nous puissions espérer. Avons-nous besoin de continuer à faire couler le sang pour atteindre ces objectifs ?
Dans l’intérêt de qui ?
Sans se demander si nous devions entamer ce cycle de violences pour les atteindre, la question à se poser aujourd’hui est : « devons-nous continuer ? ». L’Amérique veut que nous continuions à frapper les alliés de l’Iran et de la Syrie au Liban. Mais est-ce le véritable intérêt d’Israël ?
Ou notre intérêt sera-t-il mieux servi par un cessez-le-feu, une forte présence internationale, in début de processus politique et peut-être même un accord avec la Syrie ? C’est cela qui stopperait efficacement le Hezbollah.