[->http://www.haaretz.com/hasen/spages/802179.html]
Ha’aretz, 18 décembre 2006
Trad. : Gérard Eizenberg pour La Paix Maintenant
Une fois de plus, le premier ministre Ehoud Olmert a repoussé l’offre faite hier par le président syrien Bachar Assad et son ministre des affaires étrangères, Walid Mouallem, de reprendre les pourparlers de paix entre les deux pays. Le relatif assouplissement que l’on peut discerner chez les Syriens, qui proposent d’entamer des négociations sans conditions préalables, n’a pas affecté la position d’Olmert. Pas plus que le timing de cet appel venu de Damas, dirigé vers les pays occidentaux, au moment même où Téhéran organisait sa conférence négationniste. Assad signalait ainsi qu’il ne partageait pas l’appel de son allié Ahmadinejad à détruire Israël.
Pour expliquer son rejet de l’offre de Damas, Olmert évoque la position des Etats-Unis. Selon lui, au moment où le président Bush exige de la Syrie qu’elle cesse d’inciter à la guerre, il serait peu approprié pour Israël d’entamer des négociations avec Assad. De plus, toujours selon Olmert, les motivations d’Assad qui le poussent à reprendre les négociations ne coïncident pas avec celles d’Israël.
Il ne fait pas de doute que la position américaine est d’une extrême importance du point de vue d’Israël. Olmert place au sommet de ses priorités les efforts pour contrer le programme nucléaire iranien, et il part de l’hypothèse que la coordination avec Washington est aujourd’hui encore plus importante qu’avant. Accepter l’offre d’Assad, sans accord préalable de l’administration américaine, serait un pari risqué, du point de vue d’Olmert, qui pourrait nuire à Israël. Et, de toute façon, en l’absence d’un soutien actif des Américains, un accord avec la Syrie serait peu probable.
Le problème est que le défi que représente la Syrie est différent vu depuis Jérusalem ou depuis Washington. Les Etats-Unis peuvent prendre le risque de tensions avec Assad sans en payer le prix fort. Mais, pour Israël, dire « non » à une possibilité d’accord de paix avec la Syrie signifierait qu’il vaut mieux prendre le risque de la guerre plutôt que de renoncer au Golan.
Golda Meir avait pris un risque analogue en 1973 quand elle avait rejeté les signaux de paix envoyés par le président égyptien d’alors, Anouar Sadate. Elle aussi comptait sur l’administration américaine qui acceptait l’impasse au Moyen-Orient pour des considérations liées à la guerre froide. Résultat : Israël s’est retrouvé entraîné dans une guerre terrible, en conclusion de laquelle il a rendu à l’Egypte jusqu’au dernier millimètre carré du Sinaï.
Olmert ne doit pas suivre les traces de Golda Meir, qui a causé une catastrophe nationale. Il doit sérieusement étudier les propositions d’Assad, tout en maintenant un maximum de coordination avec les Américains. C’est la position du Parti travailliste, et même le président du Likoud, Benjamin Natanyahou, évoque des pourparlers avec Assad, au cours desquels Israël présenterait à la Syrie ses exigences : renonciation au terrorisme, prise de distances avec l’Iran et cessation de fourniture d’armes au Hezbollah.
S’en tenir à une politique du refus ne bénéficiera en aucun cas à Israël, qui n’aura pas davantage de soutien de la part de la communauté internationale concernant la menace iranienne. Et il ne pourra pas plus compter sur ce soutien au cas où une guerre éclaterait avec la Syrie. Pareille guerre serait perçue comme une guerre choisie pour l’annexion du Golan, guerre qui aurait pu être évitée. Il est donc important d’explorer jusqu’au bout les possibilités de la diplomatie avec la Syrie, au lieu d’attendre que la prochaine guerre éclate.