Auteur : Benny Barbash, Facebook, mardi 10 octobre 2023,
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Traducteur : Dory Cwikel pour Lpm
Photo : Benny Barbash s’exprime sur la place Horeb à Haïfa dans le cadre de la 37e manifestation contre le gouvernement israélien, avril 2023.
Mis en ligne le 11 octobre 2023
« Quand les canons tonnent, les muses doivent crier, sinon elles ne seront pas entendues. Mais dans le cas de l’échec catastrophique du 23 octobre, nous n’avons pas besoin des cris des muses. La voix du sang de nos frères et sœurs, bambins, jeunes et vieux nous crie depuis la terre :
Le gouvernement israélien nous a abandonnés. Netanyahou nous a abandonnés. Netanyahou a abandonné les habitants de Sderot (qui n’avaient reçu de protection contre les roquettes qu’après l’intervention de la Cour Suprême), Netanyahou a abandonné les habitants d’Ofakim, Netanyahou a abandonné les kibboutzim de la bande de Gaza. Netanyahou a abandonné les jeunes venus faire la fête et être heureux. Netanyahu a abandonné l’armée, il a abandonné la sécurité de l’État d’Israël et de son peuple.
Nous ne devons pas laisser un instant de plus le volant entre les mains de Netanyahou, qui a consacré tout son temps et toute son énergie, en violation de son accord sur les conflits d’intérêts, à un coup d’État judiciaire qui a pris le pas sur l’agenda de l’État d’Israël depuis la mise en place de son gouvernement.
Depuis quatre ans, nous sommes entraînés par ce bluffeur, de campagne électorale en campagne électorale. Il démantèle et établit les gouvernements d’un simple geste du doigt afin que tous servent ses objectifs.
Depuis quatre ans, il nous rend fous à force de campagnes électorales à répétition. Il sape les fondements de la société civile, sème la destruction et la division, incite une personne contre son frère, calomnie les combattants les plus courageux de l’armée. Il rejette la responsabilité de ses échecs sur les autres. Et lors des dernières élections, qu’il a « gagnées » grâce à une coalition illusoire, vide, corrompue, irresponsable et incompétente, il s’est concentré exclusivement sur le coup d’État du régime.
Depuis 10 mois nous mangeons, buvons, respirons du matin au soir 24h/24 et 7j/7 le coup d’État judiciaire Pas une seule discussion sérieuse sur les problèmes de sécurité de l’État d’Israël. Sur le coût de la vie. Sur le système de santé qui s’effondre. Sur la dérobade collective du service militaire par des publics entiers. Ou sur une évaluation globale des dommages que le coup d’État cause à la société israélienne.
Ce gouvernement s’est impliqué et continue de s’impliquer dans la destruction systématique de la fonction publique. En distribuant des emplois à des proches non qualifiés. Dans le vol des deniers publics. Dans l’écrasement de l’armée. En déchirant la nation.
Du matin au soir, ils nous ont parlé de gouvernance et nous avons vu leur gouvernance au cours des deux derniers jours. Zéro gouvernance. « Sous – gestion ». Absence totale dans les médias sans parler dans les zones des combats qui ont eu lieu sur le sol de l’État d’Israël.
Bien sûr, la Cour Suprême est une fois de plus responsable de l’incompétence totale dont ont fait preuve le Premier ministre et ses ministres depuis le début de la guerre !
Entre-temps, ils sont revenus et nous ont expliqué quelle grande puissance nous sommes, nous ont mis en garde contre l’arme nucléaire iranienne et nous ont dit à quel point Tsahal est omnipotent, alors que chaque réserviste ou père de soldat connaît l’amère vérité. Tsahal n’a pas d’armée de terre . Les blindés, l’artillerie et l’infanterie sont toutes devenues une force de police et de sécurité à Hébron, Hawara et Chomesh. Les soldats de réserve s’entraînent rarement. Les unités spéciales sont diminuées.
Des théories du complot en provenance d’Iran et de Russie circulent (vérifié). Un groupe d’Israéliens malfaisants leur fait écho afin d’enlever la responsabilité et le blâme de Netanyahou et de les rejeter sur l’armée et le Shin Bet. Ceux-là, pour reprendre le dicton que j’ai inventé dans Au-delà des murs1, sont les « maniaques ». qui ne savent pas qu’ils sont des maniaques. des serviteurs assassinés d’un dirigeant opaque qui perd contact avec la réalité.
Ces théories tombent sur des oreilles attentives, dans une certaine mesure de façon justifiée, car le cœur refuse de croire au cauchemar qui se déroule sous nos yeux.
Comment un échec aussi colossal peut-il se produire?! La question perçante résonne et la réponse est d’une simplicité choquante : inattention, suffisance, opacité, paresse, arrogance, négligence, amateurisme, dégénérescence. Et des priorités déformées pendant des années et des années. Lorsque tous ces éléments sont connectés en de nombreux nœuds et interfaces, ils donnent naissance à la vision horrifiante qui se déroule sous nos yeux étonnés.
Cette réponse simple est difficile à digérer. C’est ahurissant de la recevoir. Nous? La meilleure armée du monde ? Avec une armée de l’air capable d’atteindre les installations nucléaires iraniennes ? Avec un système de renseignement sophistiqué ? Avec Monsieur La Défense à la tête du gouvernement ? Impossible!
Cela peut aussi être possible. Et c’est la réponse la plus fiable qui soit.
Il y a quelques semaines, mes amis et moi avons lancé une campagne de commémoration de la guerre de Kippour et d’avertissement : « débâcle 73 – débâcle 23, souvenez-vous des morts, préservez la vie ». Nous avons mis en garde contre la débâcle à venir. Nous avons exigé la mise en place d’une commission d’enquête avant la catastrophe et non après. Deux jours après le rassemblement devant la Kiriya (siège de l’État-Major de l’armée), nous avons reçu une horrible confirmation de nos craintes.
Et maintenant, après que pendant deux jours les forces spéciales, les plus « d’élite » de l’armée (et elles sont effectivement d’élite, mais peu nombreuses) se sont affrontées à des groupes de terroristes épuisés à l’intérieur d’Israël et les ont vaincues avec beaucoup de difficulté, nous commençons à entendre dans les media les commentateurs exhorter ce gouvernement misérable et vide de sens, ce gouvernement des réfractaires, des condamnés et des transfuges accusés – à entrer dans la clandestinité à Gaza et de l’anéantir.
Nous savons qui entrera et qui n’entrera pas. Les enfants du Premier ministre qui séjournent à l’étranger sous haute sécurité n’entreront pas, les enfants de Gafni et Goldknopf resteront dans la tente de la Torah.
Smotrich et Ben Gvir se promènent au centre de commandement souterrain de l’armée comme des fiancés sous la Houppa2 et recommandent d’entrer dans Gaza avec toute la force possible. Je me permets de supposer que le choc du ministre des Finances face aux visions d’horreur des massacres aurait été bien plus grand si les massacrés avaient été des jeunes des collines et des colons. Je ne pense pas que les kibboutzniks et les participants aux soirées dansantes l’émeuvent trop.
Le porte-parole de Tsahal ne reste pas inoccupé. Il compare et élève. L’armée israélienne, précise-t-il, a recruté 300 000 réservistes. Elle est prête à affronter n’importe quel scénario, dit-il, deux jours après que nous avons constaté de nos propres yeux que l’armée israélienne n’est pas préparée aux scénarios qu’elle connaît et ne sait pas à quels scénarios elle devrait se préparer. Pense-t-il que notre mémoire est si courte ? Et 300 000 recrues, ce n’est pas une si grande histoire. Un petit pourcentage d’entre eux supporteront le fardeau de l’entrée dans la bande de Gaza et paieront le prix élevé que cela implique.
Nous n’avons pas pu déplacer nos forces à l’intérieur de l’État d’Israël pendant des heures et des heures pour les acheminer vers les zones de combat situées à l’intérieur de la Ligne verte et nous envisageons maintenant une entrée terrestre dans Gaza.
Une telle opération, si quelqu’un ose l’initier, se transformera en un cimetière collectif pour des centaines de soldats qui n’ont pas été entraînés à la guérilla et à des combats en zones urbaines.
Nous nous rapprochons du jour où nous célébrerons le 50e anniversaire de l’entrée de Tsahal à Suez, avec une armée, des commandants et des combattants plus expérimentés et plus compétents que ceux d’ aujourd’hui. La ville de Suez s’est transformée en un abattoir pour les soldats de Tsahal. La Gaza d’aujourd’hui n’est pas la Gaza de 67 ou de 77. C’est une ville immense, minée et piégée. Elle sera pour nous ce que Stalingrad a été pour les Allemands
L’armée israélienne est une armée régulière qui ne s’est jamais préparée à ce type de guerre. Les généraux et les commentateurs qui déplacent des flèches bleues sur des photos aériennes recouvertes de plastique et qui n’ont pas l’expérience d’entrer sur le territoire d’une grande ville se parlent à eux-mêmes avec ces recommandations insensées.
Que Dieu protège nos soldats d’une décision aussi insensée.
Maintenant, il faut faire une pause. S’efforcer d’obtenir rapidement un échange de prisonniers. Renforcer notre emprise sur la Terre souveraine d’Israël. Renforcer l’Autorité Palestinienne. S’efforcer d’obtenir un règlement politique. Punir les responsables de l’acte satanique, et renoncer à une image de victoire qui ne sera pas obtenue de toute façon. Il s’avère que les images de victoires réelles et fausses ne font que nous nuire.
Quiconque cite Bialik devrait le citer dans son contexte entier :
Et maudit soit celui qui crie vengeance!
Satan lui-même n’a pas encore conçu la peine
Qui d’un enfant puisse être la vengeance –
Puisse ce sang pénétrer jusqu’au fond de l’abîme!* »
*Il s’agit du poème Massacre, rédigé au lendemain du pogrom de Kishinev (1903). Traduit de l’hébreu par Ariane Bendavid
1 « Au-delà des murs » : Dans une prison israélienne de haute sécurité cohabitent condamnés de droit commun juifs et prisonniers politiques arabes. L’administration les manipule et entretient la haine que se vouent les deux camps. Un drame va interrompre cette spirale infernale. Ce film, réalisé par Uri Barbash, a déchaîné les passions en Israël. Il a obtenu le prix de la critique internationale au Festival de Venise en 1984.
2Une houppa est un dais traditionnellement utilisé lors de la cérémonie juive du mariage.