Jerusalem Times, 18 juin 2007
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Trad. : Gérard Eizenberg pour La Paix Maintenant
Les dégâts que beaucoup de Palestiniens craignaient ont eu lieu. Et pas d’excuses, nous partageons tous les responsabilités. Le Hamas a gravement terni son image de mouvement démocratiquement élu, en ayant recours à la force brutale pour résoudre le conflit de pouvoir qui a résulté de sa victoire aux élections en janvier 2006. Jusqu’au putsch militaire qui a permis au Hamas de prendre le contrôle de la bande de Gaza, ce mouvement jouissait d’un bon crédit, sur le plan de la démocratie et de la moralité. Mais l’impatience de ses éléments les plus radicaux, et son alliance avec des partenaires extrémistes de la région, pourraient provoquer la fin du premier parti islamiste arabe à avoir conquis le pouvoir par les urnes.
Aujourd’hui, malgré sa suprématie militaire à Gaza, le Hamas a perdu le soutien de la société civile palestinienne. L’opinion a été horrifiée par la barbarie et les atrocités commises par ses miliciens. Le Hamas a sapé le processus démocratique et permet à une combinaison de forces, à l’intérieur et à l’extérieur, de rechercher son élimination.
On a beaucoup accusé le président Mahmoud Abbas d’indécision, mais Abbas savait que quiconque aurait recours à la force perdrait sa légitimité et le soutien du peuple, comme celui du monde arabe et de la communauté internationale. Les radicaux du Hamas se sont suicidés politiquement en provoquant la guerre civile et en usurpant le pouvoir par la force. Le président Abbas a finalement été forcé d’agir, avec le soutien de la majorité du peuple.
Abbas a limogé le premier ministre Ismaïl Haniyeh et nommé un nouveau gouvernement sous la direction du Dr Salam Fayyad, chargé de réparer les dégâts qui ont divisé la future Palestine en deux entités : Gaza, sous la domination militaire du Hamas, et la Cisjordanie, sous la légitimité de la présidence et de l’OLP. Le gouvernement d’urgence de Salam Fayyad, selon la loi fondamentale palestinienne, dispose d’un mandat de 30 jours, qui peut être renouvelé jusqu’à 90 jours, évitant ainsi une confrontation constitutionnelle avec la majorité parlementaire du Hamas. 90 jours ne suffiront pas pour réparer les dégâts des 15 derniers mois. Le président Abbas et ses experts juridiques doivent chercher des moyens légaux permettant de prolonger ce mandat au moins jusqu’à la fin du mandat du président, dans 20 mois. Période dont Fayyad a besoin pour traiter les dommages politiques et économiques, et pour réparer et stabiliser l’effondrement de l’intérieur. Fayyad doit avant toute chose s’attacher à éviter que la sécurité ne s’effondre en Cisjordanie, instituer une force de sécurité qui serve la nation et non des individus et des clans, pourvoir aux besoins essentiels du peuple à Gaza, sans tenir compte de la prise de contrôle illégitime à Gaza, et travailler à préserver les relations avec Gaza, malgré les désaccords politiques. L’économie palestinienne doit constituer une priorité absolue. Les plans préparés par Fayyad, quand il était ministre des finances doivent être appliqués, alors que les sanctions internationales sont en train d’être levées.
Quand l’émotion retombera, le Hamas devra revenir à un comportement rationnel, faire sortir les armes et les miliciens masqués des rues de Gaza, observer et appliquer l’état de droit. Les assassinats de ses rivaux politiques et militaires doivent cesser immédiatement. Dès que possible, le Hamas devra accepter le limogeage d’Ismaïl Haniyeh et de son gouvernement, et commencer à rechercher la réconciliation. L’avenir du Hamas n’est pas d’être une force militaire, sa force est politique. Il doit renoncer à la violence pour empêcher que Gaza ne sombre encore davantage dans la violence. Dans le cas contraire, cela donnerait aux durs en Israël le prétexte parfait pour tenter d’éliminer le Hamas par la force. Déjà, des plans de ce genre sont en train d’être discutés au sein du cabinet d’Ehoud Barak, nouveau ministre de la défense.
En deuxième lieu, si les forces lucides au sein du Hamas prévalent, il devra éviter toute radicalisation supplémentaire et toute confrontation militaire, pour ne pas être éliminé par la force. Le Fatah comme le Hamas doivent méditer l’expérience algérienne : dans une guerre civile, tout le monde est perdant. Les partisans palestiniens du Hamas, comme le peuple palestinien dans son ensemble deviendront des victimes si la déchirure actuelle doit s’élargir encore. Les aspirations nationales du peuple palestinien à l’auto-détermination et à l’indépendance seraient alors gravement compromises, et les souffrances augmenteraient.
Aujourd’hui, le Hamas doit travailler honnêtement avec la commission spéciale de la Ligue arabe, formée récemment pour rétablir les relations et soigner les blessures. Pour éviter l’impasse constitutionnelle, le Hamas doit envisager sérieusement des élections anticipées, pour regagner la confiance de l’opinion. De plus, la libération du journaliste de la BBC doit être l’un de ses premiers actes sur le chemin de la restauration de l’état de droit à Gaza. Et le Hamas, s’il désire sérieusement montrer qu’il soutient la récente déclaration d’Ismaïl Haniyeh selon laquelle le Hamas accepte un Etat palestinien dans les frontières du 4 juin 1967, doit libérer le soldat [israélien] Gilad Shalit en se servant des bons offices du président Abbas. Cela l’aiderait à renverser l’opinion négative qu’on a de lui dans le onde entier.
Le président, quant à lui, doit se montrer ferme et résolu. Il a été forcé d’agir, mais il doit garder à l’esprit qu’il a été élu pour veiller au bien-être de son peuple, de tout son peuple. Abbas doit oeuvrer au rétablissement du dialogue intérieur, à la reconstruction économique, à des réformes massives et à la fin de l’occupation. Programme immense, mais personne à part lui ne dispose de ce mandat. Tous, apportons-lui notre soutien, et prions pour sa réussite.