Ha’aretz, 22 octobre 2007
[->http://www.haaretz.com/hasen/spages/915306.html]
Traduction : Gérard Eizenberg pour La Paix Maintenant
De vieux routiers de la gauche israélienne qui ont récemment rencontré Ehoud Olmert racontent qu’il est déterminé à se retirer des territoires et à mettre fin au conflit. D’après eux, Olmert est conscient du fait qu’un échec au prochain sommet d’Annapolis représenterait une victoire pour les extrémistes des colonies, le Hamas et l’Iran. Que, si cela ne tenait qu’à lui, il conclurait un accord avec Mahmoud Abbas. Que, sans ses problèmes à l’intérieur de son parti et de sa coalition, il signerait un accord qui ressemblerait aux paramètres Clinton et à l’initiative de Genève. Rien de moins. Les menaces de faire tomber la coalition, venues de Lieberman (Israel Beitenou) et de Yishaï (Shas) ont fait du premier ministre l’enfant chéri du camp de la paix, un fruit à protéger soigneusement dans de l’ouate.
Mais le Olmert que nous voyons est-il un Olmert nouveau, ou simplement un avocat expérimenté qui sait chanter la chanson que les juges ont envie d’entendre ? Comment saurons-nous si le premier ministre est véritablement prêt à payer le prix d’un accord (quitter 90% de la Cisjordanie, diviser Jérusalem), ou s’il s’agit du jeu d’un politicien en difficulté qui lutte pour sa survie ? Un dirigeant, comme n’importe quel mortel, est jugé sur ses actes et non sur ses belles paroles. Or, certains des actes du gouvernement Olmert ne concordent pas avec l’image qu’en donnent ses partenaires travaillistes et ses partisans du Meretz. Ces actes, outre un certain nombre d’échecs, non seulement contredisent ses déclarations pacifiques, mais parsèment d’embûches le chemin qui mène à la paix.
Quel poids a donc le discours d’Olmert sur la nécessité d’une réconciliation avec les Palestiniens alors qu’en même temps, il pousse à la reprise des travaux à la Porte Mougrabi, près du Mont du Temple / Haram al-Sharif [Sur l’affaire, voir [ et [->https://www.lapaixmaintenant.org/article1524] ]]? Il est difficile de croire qu’un politicien expérimenté comme Olmert, de surcroît ancien maire de Jérusalem, n’a pas tenu compte du caractère explosif de ces travaux à un endroit particulièrement sensible, qui pourrait saboter les négociations avec Abbas. (…)
Et comment un paysan palestinien du Mont Hebron est-il censé interpréter les informations sur le désir d’Israël d’évacuer la plupart de la Cisjordanie alors que l’armée exproprie toujours davantage de ses terres, donnant ainsi le feu vert aux colons de la colonie sauvage proche de chez lui pour dévaster son oliveraie ?
Que valent l’engagement d’Olmert d’évacuer les colonies sauvages et son discours sur une solution à deux Etats alors que, dans le même temps, son vice-premier ministre Haïm Ramon distribue un nouveau document qui parle de développer des colonies et même de créer de « nouveaux quartiers » autorisés du temps où Itzhak Shamir était premier ministre ?
Les défenseurs de gauche d’Olmert garantissent sa sincérité. Ils disent qu’il a depuis longtemps accepté l’idée de renoncer aux territoires à l’est de la clôture de séparation. Dans ce cas, ils devraient lui demander pourquoi il a fait échouer un projet de loi concernant l’évacuation volontaire de colons, présenté par 16 députés travaillistes et du Meretz. Ami Ayalon, aujourd’hui vice-ministre de la défense, qui faisait partie des initiateurs de ce projet de loi, explique que ceux qui s’y opposent transforment des milliers de colons israéliens en otages. Mais d’après Olmert, les négociations ne concernent en rien les colonies à l’est de la clôture. Or, quiconque lit la presse sait que, dans le meilleur des cas, un accord final laisserait à Israël les implantations situées à l’ouest de ladite clôture. Si Olmert a réellement l’intention d’évacuer les 74 colonies situées entre la clôture et le Jourdain, qu’attend-il ? Si l’on en croit un sondage effectué par One Home, une ONG qui promeut l’évacuation volontaire, la moitié des 20.000 familles qui habitent ces colonies, dont certaines sont de toute façon en train de s’éteindre doucement, n’ont pas envie de revivre l’expérience des évacués de la bande de Gaza.
Nos sages enseignent : « Vos actes vous rapprocheront, vos actes vous éloigneront. » Vos actes, chers camarades de gauche, pas vos paroles.