Ce qui vient de se passer à Gaza démontre une fois de plus la fragilité de ce qui semble acquis et l’imprévisibilité de ce qui peut l’être. A deux doigts d’une accalmie, on se retrouve sans transition à un doigt de la guerre puis en plein maelstrom politique.
Surprenante… telle est l’une des caractéristiques de la politique israélienne. Ce qui n’est pas surprenant, c’est qu’il y a toujours un prix à payer lorsque qu’on promet à perdre haleine tout en sachant qu’on est incapable de fournir ce qui a été promis. Le capitaine d’un paquebot peut tourner le gouvernail à l’improviste et brutalement, le paquebot ne suivra pas. Il lui faut du temps et de la distance pour négocier son virage. L’opinion publique est ce paquebot. On ne peut lui « vendre » pendant des années qu’on va en finir avec le Hamas puis, presque sans transition, transiger, négocier… bref, revenir les pieds sur terre. Le paquebot, lui, continue sur sa lancée et persiste à croire ce qu’on lui a ressassé pendant des années. Pas surprenant que le capitaine se trouve en difficulté alors que, paradoxalement, il retrouve semble-t-il un peu de la raison perdue.
Alors que des responsables de l’opposition jouent sur une fibre populiste et sur la frustration des habitants du pourtour de Gaza chauffés à blanc tant par le discours que par un vécu insupportable, et que l’éclairage médiatique donne à penser que toute la population parle d’une même voix, nous avons choisi de relayer « une autre voix ».
« Other Voice/Une autre voix/Kol Akher », qui regroupe des habitants de Sderot et des agglomérations avoisinantes, prône une solution non violente au conflit et entretient des échanges continus avec des habitants de la bande de Gaza. Cette ONG a envoyé, au moment où nous écrivons ces lignes, une lettre ouverte à Benjamin Netanyahu.
« Nous, habitants de Sderot et du pourtour de Gaza, voulons exprimer notre soutien à la décision d’un cessez-le-feu généralisé. Le soutien de tous les chefs des services de sécurité donne à cette décision un surcroit de validité. Cependant, en tant qu’habitants de cette région, il est clair pour nous que toute trêve de ce type reste fragile et de courte durée ; il faut agir avec détermination afin d’obtenir un accord de longue durée incluant un programme de réhabilitation et de développement de la bande de Gaza. Tant que des gens vivront, à quelques minutes à peine de chez nous, dans des conditions inhumaines, les habitants d’ici ne pourront connaitre la sécurité.Le blocus qui perdure frappe durement les Gazaouis mais, en même temps, il porte atteinte à la sécurité d’Israël en accentuant la haine et en encourageant la vengeance et le terrorisme. C’est un baril d’explosifs dont le désespoir, la frustration et la colère, peuvent provoquer l’explosion à tout moment.Dans la situation actuelle, sans réel changement, la reprise du cycle de violence n’est qu’une question de temps et une fois de plus, notre vie et la leur seront un véritable cauchemar.Nous vous lançons un appel : agissez énergiquement pour obtenir un accord à long terme qui assurera le maintien du calme ainsi que la réhabilitation de la bande de Gaza et sera l’occasion pour nous et nos voisins de vivre enfin dans la dignité.
Nous vous remercions par avance de votre réponse. »
Ilan Rozenkier
24 novembre 2018