En cette période de l’année nous devrions éprouver une joie empreinte de tristesse. Tristesse, car nous venons de nous remémorer la Shoah et avons senti à nouveau, et charnellement pour nombre d’entre nous, ce qu’est une “famille à trous”. Puis il va y avoir la tristesse que génère le souvenir de tous ceux qui sont tombés pour préserver l’indépendance et la sécurité de l’État d’Israël.
Lettre d’information de La Paix Maintenant, le 16 avril 2018
Illustration : Timbre célébrant les soixante-dix ans de l’État d’Israël [DR]
Et puis il y aura l’espérance que génère la cérémonie commémorative du Souvenir, au cours de laquelle Israéliens et Palestiniens, sans rien renier de leur histoire, accepteront la douleur de l’Autre pour s’efforcer de construire un avenir dénué de haine et de violence. Ce sera la treizième année, celle de la maturité, qu’existe cette cérémonie à laquelle de plus en plus de monde participe. Certes, elle suscite également de multiples réserves et oppositions, ne serait-ce qu’à cause de l’adjectif alternatif qui lui est souvent accolé. Qui dit “alternatif” dit “remplacement”, or il ne s’agit en aucun cas de renoncer à sa douleur mais d’accepter celle de son adversaire et de lui reconnaître sa part d’humanité. Qui peut croire un instant que David Grossman — qui a perdu son fils lors de la guerre de Gaza et qui sera le principal intervenant israélien à cette cérémonie, quelques jours avant de recevoir le prix d’Israël — accepterait ne serait-ce que l’ombre d’un instant de rayer de sa mémoire celui qui a été et ne sera plus. Le ministre de la Défense a commis une mauvaise action en refusant aux 110 Palestiniens qui devaient y assister l’autorisation de s’y rendre. Espérons que la Cour suprême, qui a été saisie mais ne s’est pas encore prononcée au moment où ces lignes sont écrites, saura effacer cette tache. Sinon, comme l’an passé, la technologie permettra, par écrans interposés, le partage de ces instants à défaut du contact direct.
Puis ce sera la joie de Yom Ha’Atzamaouth. Mais cette joie, bien réelle, ne saurait être complète alors que les heurts à Gaza ne seront sans doute pas finis ; alors que le processus politique, pourtant indispensable, n’aura pas été relancé ; alors que le contexte régional reste lourd d’inquiétudes ; alors que les réfugiés africains ne sauront sans doute toujours pas quel sort leur sera réservé ; alors que la violence verbale et la délégitimation s’exacerbent à l’encontre du camp de la paix — mais pas seulement ; alors que la restriction des compétences de la Cour suprême, garante de la démocratie israélienne, aura peut-être été entérinée.
On aurait presque l’impression que Nétanyahou et ses ministres se sont donnés le mot pour mettre en exergue la pertinence de la thématique du prochain colloque que nos amis de JCall organisent le 28 avril prochain et auquel LPM s’associe.
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L’Auteur
Sociologue et membre-fondateur des Amis de Shalom Akhshav, devenus La Paix Maintenant, Ilan Rozenkier a été élu président de l’association en 2014.