Le conflit syrien qui est entré ces jours-ci dans sa 8e année témoigne de l’impuissance de la communauté internationale. Cette même communauté qui, dans le cadre et à l’occasion de la mise en œuvre d’une solution politique au conflit israélien, si elle advient et elle adviendra, quelle que soit sa configuration, devrait avoir un rôle à jouer.
Mais quelle confiance un citoyen israélien standard pourrait-il bien accorder à une telle communauté internationale, incapable d’empêcher les massacres de masse de populations civiles ?
Lettre d’information de La Paix Maintenant, le 21 mars 2018.
Photo-montage :Donald Trump et Kim Jong-ûn ©tellmemoretv.com [DR].
S’agissant des dispositifs de sécurité, de surveillance de zones démilitarisées, les Israéliens y regarderont à deux fois (au moins et sans doute plus encore !) avant de prendre en considération les promesses et de se fier aux engagements d’un partenaire de ce genre.
Or, si Israël se persuade qu’il ne peut compter que sur lui-même, qu’il ne saurait déléguer à quiconque des arrangements sécuritaires, un tel repliement induit d’imposer aux Palestiniens une présence militaire israélienne qu’on les voit mal accepter. Ainsi le conflit syrien influe-t-il doublement sur la réalité israélo-palestinienne, militairement et psychologiquement.
Militairement en créant une incertitude et une instabilité dangereuses sur le front nord, qui était le plus apaisé jusqu’à ce que la situation interne en Syrie ne se dégrade. L’implantation du Hezbollah en Syrie se surajoutant à celle qui est la sienne au Liban, ainsi que l’ombre de l’Iran constituent à l’évidence une menace qui ne saurait être ignorée.
Psychologiquement, la paralysie internationale rend une large fraction de l’opinion publique d’autant plus extrémiste que celle-ci est choquée par l’intensité des massacres, qu’elle perçoit comme s’exerçant “en famille” : Arabes contre Arabes, musulmans contre musulmans… Qu’en sera-t-il, se demande-t-elle plus ou moins consciemment, dès lors que la confrontation aura lieu avec des “étrangers” à la famille, des juifs ? Le trauma de la Shoah n’est plus très loin, avoué ou non.
Heureusement que dans un contexte particulièrement assombri et dénué de perspectives d’ouverture, une étincelle jaillit de là où on ne l’attendait pas et ne concerne en rien la région.
L’annonce de la rencontre — sans doute d’ici la fin du mois de mai — entre le président américain Donald Trump et le dirigeant nord-coréen Kim Jong-un a fait l’effet d’un coup de tonnerre qui n’était pas sans rappeler celui qui, en son temps, a assourdi le monde israélo-arabe à l’occasion de l’annonce de la venue de feu le président égyptien Anouar el-Sadate en Israël, visite qui ouvrit la voie à l’accord de paix entre les pays jusque-là ennemis.
Ce qui importe à ce stade, ce ne sont pas les effets attendus de cette rencontre mais l’annonce elle-même, son caractère aussi improbable qu’impensé par les experts eux-mêmes. Si le pire n’est jamais sûr, le mieux sinon le meilleur reste toujours possible.
Dans le contexte israélo-palestinien qu’enserre une désespérance larvée, ce retour de l’impensé, parce qu’impensable, ne peut être qu’une bonne nouvelle, suffisamment rare pour ne pas bouder son plaisir… tout en sachant que comparaison n’est pas raison.
L’Auteur
Sociologue et membre-fondateur des Amis de Shalom Akhshav, devenus La Paix Maintenant, Ilan Rozenkier a été élu président de l’association en 2014.