Traduction Kol Shalom (les Amis belges de Shalom Akhshav)
Le Washington Post de vendredi dernier a publie un editorial surprenant, qui
appelait le President George W. Bush de mettre a l’epreuve les intentions et
le serieux d’Ariel Sharon sur sa position a l’egard de l’ Etat palestinien
preconise par le President. L’editorial proposait que Bush subordonne l’aide
exceptionnelle et les guaranties d’emprunt consenties a Israel au gel
complet des constructions dans les colonies.
Dans l’intervalle, un document des Amis Americains de La Paix Maintenant
(Shalom Akhshav) circulant chez les membres du Congres, demandait de
conditionner l’approbation de l’aide a Israel au demantelement de tous les
avant-postes illegaux. Les militants pour la paix ont egalement propose
qu’Israel soit tenu d’allouer 20% des prets a preparer les habitations
destinees aux colons des territoires qui seront evacues dans le cadre des
accords de paix.
Il n’y eut pas de tremblement de terre a Washington a la suite de ces deux
faits. Toute phrase ou il n’est pas question des termes « Irak » ou « Saddam »
passe actuellement a cote de Bush. Ses conseillers strategiques, par
ailleurs, sont occupes par les scenarios de l’apres guerre avec l’Irak, dans
lesquels aucune mention n’est faite des termes « pression pour demanteler les
colonies ».
Le Vice-President Richard Cheney, le Secretaire a la Defense Donald Rumsfeld
et le conseiller Richard Perle ne croient pas que la paix au Moyen Orient
viendra d’une reponse aux soucis des Arabes. Ils considerent que la paix ne
sera etablie que par la force. Et d’apres eux, c’est exactement ce que
Sharon fait. Sans la crainte d’embarrasser leur copain Tony Blair, leur ami
Ariel Sharon pourrait bien rendre le Mont du Temple accessible aux visiteurs
juifs, ainsi que le propose actuellement une publicite sur la radio publique
israelienne.
Pour leur part, les Palestiniens sont egalement arrives a la conclusion que
s’ils doivent compter sur les plans de Bush et de Sharon, ils n’iront nulle
part. D’un autre cote, les resultats des elections ont montre a leurs
dirigeants que le chemin vers un accord de paix doit commencer par la base.
Aussi frustrant et ennuyeux que cela puisse etre, les premiers pas
commencent par l’electeur israelien qui est passe du Meretz au Shinoui parce
qu’il a perdu confiance dans la volonte des Palestiniens d’aboutir a un
accord de paix, et aussi par l’electeur qui est passe du Parti travailliste
au Likud apres avoir ete convaincu que les Arabes veulent jeter les
Israeliens a la mer. Cela, la conscience palestinienne n’a commence a le
comprendre que quelques mois avant les elections.
L’initiative qui a debute par des contacts entre les groupes d’experts
diriges par le ministre palestinien de l’information Yasser Abed Rabbo et
par Yossi Beilin ont rassemble des Palestiniens qui jouissent d’une
influence considerable au sein de leur population, y compris Yasser Arafat
en personne.
L’esquisse de plan de paix qu’ils ont formulee, base sur le plan Clinton et
les accords de Taba, est actuellement revu et presque pret pour la
publication. Il comprend de nouveaux arrangements de securite bases, durant
une phase interimaire, sur la presence d’une force etrangere (cette semaine,
l’IPCRI – Centre Israel Palestine pour la Recherche et l’Information – a
tenu une premiere session sur les questions de securite a Chypre, sous le
patronage de la Grande Bretagne, qui a finance cette conference).
Non moins important est le fait que ce nouveau document ne mentionne pas le
droit au retour en Israel des refugies. Le diplomate et journaliste francais
Eric Rouleau, qui etait a Ramallah le week-end dernier, rapporte qu’Abou
Mazen lui avait indique que toute la question du droit au retour avait ete
mise en avant de facon symbolique pour les refugies, et avait souligne que
quelques-uns seulement envisageaient un retour en Palestine. Le responsable
palestinien a ajoute que l’accord garantirait que l’equilbre demographique
d’Israel ne soit pas sape.
Beilin a complete sa liste des personnalites israeliennes qui presenteront a
leurs compatriotes l' »accord de l’ombre » (shadow agreement) qu’il a etabli
avec Abed Rabbo. Parmi ces personnalites, des gens au passe militaire
impressionnant ainsi que des chefs d’entreprise de premier plan. Le
president du parti travailliste Amram Mitzna a ete mis dans la confidence et
va soumettre le document complet a l’approbation de son parti.
Ces derniers mois, Mitzna s’est entretenu avec Ami Ayalon, qui a signe un
accord de principe beacoup plus general avec le professeur Sari Nusseibeh.
Ayalon a obstinement resiste a la proposition de Mitzna de transformer le
programme Ayalon-Nusseibeh en une sorte de meta-platforme pour tous les
partis situes a la gauche du Likoud. Ayalon a etabli un quartier general a
Ramat Gan, d’ou les preparatifs sont en cours pour lancer une gigantesque
petition sous le slogan : « Les Voix du Peuple ». Ayalon croit qu’une
initiative non partisane serait acceptee plus aisement par la population. La
date de lancement de la campagne serait decidee la semaine prochaine.
Apparement, a ce propos, Mitzna a rate le train. Pendant la campagne
electorale, il a annonce qu’il proposerait aux Palestiniens de reprendre les
negociations au point ou elles furent rompues a Taba. Il s’avere que ce
point n’est plus approprie aujourd’hui, d’autres ayant pris les devants.
Test reussi
La rencontre de Mitzna avec Sharon a constitue son premier examen de passage
dans la classe des grands. S’etant bien prepare avec l’aide de certains
collegues de son parti, Mitzna a reussi cet examen haut la main. Le Parti
travailliste a ainsi fait un pas de plus pour s’ecarter du gouvernement
Sharon
Haim Ramon a propose a Mitzna de questionner Sharon sur Netzarim, Kfar
Darolm (colonies de la Bande de Gaza) et Hebron. Ramon avait explique que
les reponses, quelles qu’elles fussent, embarrasseraient Sharon. Si le
Premier Ministre mettait en avant l’importance strategique de Netzarim, la
signification symbolique de Kfar Darom et la signification religieuse de
Hebron, il fournirait a Mitzna, selon Ramon, la preuve que le Likoud n’etait
pas un partenaire.
Ramon persuada Mitzna qu’il ne devait pas craindre l’improbable possibilite
que Sharon le surprenne en adoptant le plan du Parti travailliste de
deplacer les israeliens hors de Gaza et d’abandonner la ville des ancetres –
une position qui aurait laisse a Sharon a peine une douzaine de sieges,
faisant de Mitzna le leader du plus grand parti de la Knesset.
Nous savons a present que Sharon n’a surpris personne. Il a repete presque
mot pour mot ce qu’il avait dit a l’emissaire americain Anthony Zinni il y a
un an. Zinni avait aussi voulu savoir si le demantelement de Netzarim etait
l’une de ces « douloureuses concessions » dans la vision de la paix du premier
ministre. Le general americain, veteran de plusieurs guerres, ne sut pas
s’il devait rire ou se sentir insulte lorsqu’il entendit l’analyse militaire
de Sharon expliquant que les civils de Netzarim etaient vitaux pour la
protection de la securite nationale d’Israel dans le port de Gaza.
L’impression peu favorable de Zinni apres ses tentatives de clarifier
l’horizon politique brumeux de Sharon est parvenue aux oreilles des
ministres de l’epoque, Shimon Peres et Benjamin Ben-Eliezer – qui resterent
sans reagir. Mitzna, de son cote, se hata de convoquer son parti et
d’alerter la presse, (…) se delestant ainsi d’une bonne partie de la
pression a rejoindre le gouvernement de Sharon.
Les collaborateurs de Mitzna disent que la seule chose qui le tient eveille
la nuit est la possibilite que Sharon prenne le flambeau d’un « gouvernement
laique d’unite « . L’analyse actuelle au QG du parti travailliste est que si
Sharon surprenait tout le monde en agisssant de la sorte, Mitzna serait
pietine par les membres du parti travailliste se precipitant vers le Ranch
Sycomore. (NDLR : le ranch de Sharon)
Cependant, les collaborateurs du premier ministre disent que le president
travailliste n’a pas de soucis a se faire. Rejeter le Shas, la Torah Unifiee
du Judaisme et le Parti National Religieux ne serait pas moins douloureux
pour Sharon que l’abandon de Netzarim, Kfar Darom et Hebron.
Les veritables craintes de Mitzna ne resident pas dans le puzzle de la
coalition de Sharon, mais elles n’en sont pas moins serieuses pour lui. Si
Sharon arrive a alleger de quelques milliards le budget qui s’ecroule sous
le deficit, et s’il licencie des milliers – sinon des dizaines de milliers
de fonctionnaires – , le nouveau leader du Parti travailliste devra renvoyer
la petite equipe qui reste au quartier general Hatikva du parti. Meme avant
que le parti ait perdu quatre sieges et le financement que cela represente,
le deficit du parti atteignait 1 million de NIS par mois (1 million de
revenus pour deux millions en depenses).
Mitzna doit regarder par dessus son epaule a tout moment. Ben-Eliezer a deja
commence a rassembler ses partisans dans une nouvelle campagne
d’affiliation. L’affiliation actuelle expire le mois prochain. La majorite
des supporters de Mitzna ayant rejoint le parti a la veille des primaires de
l’annee derniere, celui-ci devra consacrer beaucoup de temps et d’energie
afin qu’ils gardent leur foi en lui dans l’avenir
Mitzna veut changer les regles du parti afin que l’affiliation soit
prolongee d’un an, evitant ainsi le desengagement de la plupart des nouveaux
membres qui ont des liens distants avec le parti mais des liens etroits avec
lui. Sans une nouvelle campagne d’affiliation, le parti appauvri commencera
a perdre des millions de shekels de cotisation dans les prochains mois.