Shanna ORLIK : “La présence du Parti arabe Raam dans la coalition de gouvernement est une avancée pour la démocratie israélienne

Dans le cadre de “Chroniques pour la Paix”, émission bimensuelle sur Radio Shalom parrainée par La Paix Maintenant et par JCall, Ouzi Meyerson s’entretient avec Shanna Orlik, alors que le nouvel exécutif israélien est plus fragilisé que jamais, ce qui renforce la position du Parti arabe RAAM, ses six députés ayant rejoint la coalition de gouvernement suite au dernier scrutin législatif.
Cette participation et cette situation politique sont insupportables à l’extrême-droite israélienne. Récemment Shmuel Trigano, philosophe franco-israélien bien connu, écrivait à ce propos : «Les Frères musulmans font la décision dans la vie parlementaire israélienne aujourd’hui ». Cette assertion, assez ignoble, montre si besoin était qu’il convient de revenir sur ce qu’est le Parti RAAM, ce qu’il fait au gouvernement et ce qu’il obtient en échange de son soutien à la coalition.

SHANNA ORLIK, conseillère en charge des affaires de la société arabe auprès de YAIR GOLAN, vice-ministre de l’économie. Auparavant, elle a travaillé pour l’Organisation sioniste mondiale en tant que chef de projets pour la jeunesse. Originaire de France, elle est membre du Parti Meretz.


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Pour Shanna Orlik, la participation du Parti arabe RAAM est une révolution dans l’histoire de la gouvernance d’Israël. Elle est d’autant plus remarquable qu’au départ cette formation était considérée comme conservatrice musulmane et s’adressant essentiellement aux bédouins du Néguev (sud du pays). Ce sont eux qui sont les plus fidèles à Mansour ABBAS, le leader de RAAM. “Ce parti a beaucoup évolué depuis qu’il a décidé de rejoindre une coalition soutenant le gouvernement d’Israël. Cette participation est très positive et sans réticences vis-à-vis de l’État”, constate la conseillère qui connaît personnellement Mansour ABBAS qu’elle rencontre régulièrement pour la mise en place des programmes de développement.

Shannah Orlik souligne que la décision de RAAM de rentrer dans le jeu politique n’est pas récente, des contacts avec Benjamin Netanyahou avaient été pris à trois reprises lorsque celui-ci était Premier ministre. Mais c’est lors de la mise en place du Gouvernement Bennett/Lapid que l’accord s’est concrétisé. “RAAM a compris qu’il pouvait bénéficier des avantages que lui procure le système israélien d’élection à la proportionnelle intégrale; il est sorti de l’expectative pour cette raison. Ils ont émis des demandes très claires quant à leur soutien concernant le développement de la société arabe. Elles portaient sur tous les secteurs : emploi, éducation, infrastructures, accès à l’eau potable, tourisme, lutte contre la criminalité. Il s’agit donc de « demandes basiques » pour remettre à niveau les conditions de vie de la communauté arabe et les rapprocher de celles de la population juive. Au total, cet ensemble de mesures représente trente milliards de Shekels (1) d’investissements pour tous les ministères. Déjà, on peut en voir les résultats sur le terrain“.

La conseillère de Yaïr Golan reconnaît qu’au départ le ralliement de RAAM à une coalition gouvernementale n’allait pas de soi ; ce parti avait la réputation d’être une formation islamiste, non pas au sens djihadiste, évidemment, mais au sens de la défense des valeurs conservatrices touchant, par exemple, à la place de la femme dans la société musulmane ou de l’acceptation des LGBT. “En fin de compte, explique Shanna Orlik, RAAM fait preuve d’une grande responsabilité dans sa participation au gouvernement. Il a mis de côté ses positions conservatrices et se concentre sur la gestion des dossiers prioritaires pour le bien-être de la société arabe. Sa démarche a quelque chose de similaire avec celle de YEMINA, le parti de Naftali Bennett, le chef du gouvernement, qui au départ est une formation de droite nationaliste religieuse. Cette dernière, une fois au pouvoir, a fait également preuve d’une grande responsabilité en mettant en avant la nécessité de garantir la paix civile, le respect des institutions et l’efficacité opérationnelle après la période déstabilisatrice de Netanyahou”.

Shanna Orlik espère que l’engagement de RAAM pourra infléchir le comportement politique des autres formations arabes qui refusent, par principe, toute participation à un gouvernement “sioniste” d’Israël. “Mais, pour l’instant, reconnaît la conseillère, elles n’en prennent pas le chemin. La Liste Arabe Unifiée maintient sa ligne idéologique critique. Il n’empêche, la présence de RAAM dans la coalition est une avancée démocratique en ce qu’elle contribue à représenter l’ensemble des composantes de la société du pays”.

(1) 30 milliards de shekels équivalent à 8,5 milliards d’euros

Mis en ligne le 26 mai 2022