Ha’aretz 30/12/08

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Traduction : Charlie Slackmann pour La Paix Maintenant


Maintenant, après les premières et sévères frappes israéliennes sur Gaza, ce
serait une bonne chose d’arrêter et de s’adresser aux chefs du Hamas pour
leur dire : jusqu’à samedi dernier, Israël a fait preuve de retenue face aux
milliers de roquettes Kassam tirées depuis la bande de Gaza. Maintenant,
vous comprenez à quel point notre réaction peut-être dure. Cependant, afin
de ne pas ajouter aux morts et à la destruction, nous avons l’intention de
cesser-le-feu de façon unilatérale et absolue pour les prochaines 48 heures.
Même si vous continuez de tirer sur Israël, nous ne reprendrons pas les
opérations. Nous serrerons les dents, comme nous l’avons fait jusqu’à
récemment, et nous ne nous laisserons pas entraîner à répliquer par la
force. En même temps, nous appellerons solennellement les États qui le
souhaitent, proches et lointains, à un arbitrage entre vous et nous afin de
rétablir le calme. Dès lors, si vous cessez également le feu, nous ferons de
même par la suite. En revanche, si au terme de ces 48 heures, vous continuez
à tirer alors même que nous nous imposons la retenue, eh bien, nous
répliquerons. Mais même dans ce cas, nous laisserons la porte ouverte à la
négociation, tant pour revenir au calme, que pour envisager un accord
élargi.

C’est ainsi que doit être conduite aujourd’hui la politique d’Israël. Cette
option est-elle possible ? ou bien sommes-nous déjà prisonniers de
l’habituel rituel de la guerre ?

Jusqu’à samedi dernier, Israël a fait preuve -sous la direction militaire de
Ehoud Barak – d’un impressionnant sang-froid. Il ne faudrait pas que ce
sang-froid se perde dans la tourmente de la guerre. Il nous est interdit
d’oublier, même un instant, que les habitants de la bande de Gaza
continueront à être nos proches voisins, et que tôt ou tard il faudra bien
conclure avec eux des accords de bon voisinage.

Gardons-nous de les frapper de façon aussi violente, même si le Hamas,
pendant des années, a rendu insupportable la vie des habitants du sud
d’Israël, et même si ses dirigeants ont refusé toute tentative israélienne
comme égyptienne de conclure un compromis, qui aurait pu éviter
l’embrasement auquel nous assistons actuellement.

Aujourd’hui encore, il faut s’en tenir à une ligne de retenue, et tout faire
pour épargner la vie de ceux des innocents parmi les habitants de Gaza,
justement parce que la force d’Israël est quasi-illimitée, en comparaison de
la leur. Israël doit examiner sans cesse à quel instant la force qu’il met
en œuvre franchit les limites de la réaction légitime et efficace, dont
l’objectif est la dissuasion et le retour au calme, et à partir de quel
moment il se trouve à nouveau prisonnier du classique tourbillon de
violence.

Les dirigeants israéliens savent bien que vu la configuration actuelle dans
la bande de Gaza, il sera difficile d’aboutir à une victoire militaire
décisive et absolue. Nous risquons alors de nous retrouver dans un flou
indécis et sans fin, situation que nous avons déjà connue : Israël frappe le
Hamas, frappe et reçoit des coups à son tour, reçoit des coups et frappe à
son tour, et se trouve enlisé malgré lui dans tous les pièges inhérents à ce
genre de confrontation, sans pouvoir atteindre ses objectifs justes et
vitaux. Bien vite, il risque de découvrir qu’il est entraîné -puissance
militaire forte mais démunie face à l’enlisement – dans un cycle de violence
et destruction.

C’est pourquoi – arrêter, verrouiller nos armes. Pour une fois, essayer
d’agir à l’inverse du réflexe habituel ; à l’inverse de la terrible logique
de la force et de la dynamique de l’escalade. Il y aura toujours une
occasion d’ouvrir le feu à nouveau. La guerre, comme a dit Ehoud Barak il y
a deux semaines, ne s’enfuira pas. L’appui international à Israël n’en sera
pas atteint et même se renforcera, si nous manifestons une retenue calculée.
Nous pourrions alors inviter la communauté internationale et arabe à
intervenir et arbitrer.

Il est vrai que le Hamas pourrait alors bénéficier d’une période de
réorganisation. Mais de toute façon, il a déjà bénéficié de longues années
pour ce faire, et deux jours de plus ou de moins ne changeraient pas
fondamentalement la donne. En revanche, une trêve pourrait modifier sa
conduite, en lui fournissant une porte de sortie honorable, lui permettant
d’échapper au piège où il s’est enfermé.

Encore une réflexion, que je ne peux m’empêcher de livrer : si nous avions
adopté cette façon de faire en juillet 2006, après le rapt des soldats par
le Hezbollah, si nous avions alors manifesté de la retenue après notre
première frappe, et proclamé le cessez-le-feu pour un jour ou deux afin de
laisser place aux tentatives d’arbitrage et d’apaisement, il est possible
que la situation eut été complètement différente de celle que nous
connaissons aujourd’hui. Cela aussi est un enseignement que le gouvernement
doit tirer de la précédente guerre. En fait, c’est peut-être là
l’enseignement le plus important.