Yediot Aharonot, 13 mai 2008
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Traduction : Gérard Eizenberg pour La Paix Maintenant
Cela ne fait aucun doute : en ce moment même, des événements de portée mondiale sont en cours dans les cercles kabbalistes du pays, des plumes d’oie sacrées grattent des parchemins et, bientôt, le message sera délivré dans toutes les synagogues et communautés religieuses : les derniers ennuis d’Olmert sont l’œuvre de Dieu. Le premier ministre paye pour avoir péché contre son pays sacré, pour avoir osé rechercher la paix.
Car, après tout, c’est ce qui est arrivé quand Ehoud Barak a été battu, quand Ariel Sharon est tombé dans le coma, quand Haïm Ramon a été inculpé par un tribunal et quand Dan Haloutz a démissionné de son poste de chef d’état-major. Chacun d’entre eux a eu les honneurs d’une proclamation signée par des rabbins célèbres, déclarant qu’ils ont été frappés de la « malédiction du désengagement » et punis par Dieu.
Nous pouvons donc en conclure que le paganisme s’en donne à cœur joie. Mais, d’un autre côté, quand des rabbins aussi importants se livrent ainsi à la magie, qui suis-je pour mettre en doute leurs compétences ? Au contraire, je vais accepter leur folie et dorénavant, je ne mettrai plus en doute la puissance de la main de Dieu.
Toutefois, même si j’accepte maintenant de tout mon cœur le principe selon lequel Dieu est un politicien à la fois docile et vindicatif, je ne suis pas tout à fait d’accord avec l’interprétation religieuse nationaliste de Ses actes.
Ces rabbins et leurs partisans ont vraiment tendance à faire passer Dieu pour un imbécile, en laissant supposer qu’Il est non seulement le chef de l’unité des frappes chirurgicales du haut commandement rabbinique, mais encore qu’il est un parfait crédule qui marche dans toutes les opérations de communication et dans tous les bluffs de n’importe quel politicien.
Or, il se trouve que je tiens Dieu pour quelqu’un de plutôt intelligent et qu’on ne fait pas facilement marcher.
Commençons par Olmert. Il ne fait aucun doute que sa dernière affaire lui a été infligée par le Ciel, mais est-ce vraiment à cause de ses déclarations sur une paix possible avec la Syrie ? Ou à cause de son joyeux bavardage sur un accord avec Abbas ? Ou à cause de son noir dessein de détruire les colonies ?
Absolument pas. Ce n’est pas possible. Après tout, Dieu sait très bien qu’Olmert n’a jamais envisagé de réaliser quoi que ce soit de ce qui est mentionné plus haut. Que tout cela, c’est, comme on dit, des conneries. Des tentatives de gagner du temps, des tactiques de survie dénuées de toute signification pratique.
Voilà donc pourquoi Olmert est puni : pour avoir mené les gens en bateau, en Israël et en Palestine. Pour ne rien faire et pour avoir l’intention de continuer à ne rien faire. Pour parler trop tout en continuant à construire dans les colonies et confisquer des terres. Est-il surprenant que Dieu ait décidé de s’en prendre à lui ?
Ariel Sharon ? Aucun doute, Dieu s’en est pris à lui aussi. Mais était-ce vraiment à cause du retrait de Gaza [Voir à ce propos la « pulsa dinura », véritable cérémonie de magie noire dont Sharon a fait l’objet à cette époque : [ ]] ? A Dieu ne plaise ! Dieu, dans son immense sagesse, savait que le désengagement n’était qu’un plan sophistiqué destiné à la fois à créer un « traumatisme », à déconnecter la bande de Gaza de la Cisjordanie et à renforcer le Hamas, prouvant ainsi qu »‘il n’y a personne à qui parler et rien à discuter. » Doit-on s’étonner que Dieu ait puni Sharon ?
Barak ? A-t-il été battu à cause de son offre « généreuse » à Arafat. Allons donc ! Si même moi savais avant Camp David que Barak avait l’intention de tromper son monde, Dieu devait bien le savoir aussi. Barak a donc été puni pour ses tromperies, sa cruauté et son indifférence.
Et Haloutz, ex-chef d’état-major ? Dieu l’a vraiment jeté dehors. Mais était-ce à cause du désengagement ou des bombardements sur Gaza ?
Alors, soudain, le paganisme a un air beaucoup plus sympathique. Presque affable. Car si Dieu est tellement impliqué dans la politique israélienne, il est quasi impossible d’échapper à la conclusion : il est plutôt à gauche. Ce qui est, semble-t-il, le premier événement positif depuis bien longtemps.