Trad. : Gérard Eizenberg pour La Paix Maintenant
La derniere incursion de Tsahal à Ramallah, entreprise alors que le Premier
ministre Ariel Sharon est en visite à Washington, a surpris la direction de
l’Autorité palestinienne. Jusqu’ici, la norme admise était qu’Israël s’abstenait de toute opération militaire d’envergure tant le Premier ministre se trouvait à l’étranger, pour lui éviter d’être exposé à des critiques de la part de ses hôtes.
Les Palestiniens considèrent donc la réoccupation de Ramallah comme un signe
supplémentaire du changement de politique des Etats-Unis, qui adoptent peu à
peu la position d’Israël : un manque total de confiance envers le président de l’Autorite palestinienne, Yasser Arafat. « L’occupation de Ramallah hier était un message clair que nous a envoyé Washington par l’intermédiaire de Sharon », a dit Saeb Erekat, membre du cabinet palestinien.
La présence de Tsahal à Ramallah a empêché la première réunion prévue du
nouveau cabinet de l’Autorité palestinienne, dont la composition a été annoncée dimanche soir. La réunion devait avoir lieu à 18h00, dans le bureau d’Arafat. Même si de nombreux Palestiniens ont dit que ce nouveau cabinet n’était rien d’autre que la bonne vieille administration en place, on plaçait néanmoins certains espoirs en de nouveaux visages, en particulier ceux du ministre des Finances, Salam Fayyad, et du ministre de l’Intérieur, le général Abdel-Razzaq al-Yahya.
Le timing de l’entrée de Tsahal à Ramallah n’avait probablement rien à voir avec la réunion prévue du cabinet, mais l’enchaînement des événements a conduit quelques porte-parole palestiniens à poser la question : qui a besoin d’un gouvernement palestinien si le gouvernement israélien, à travers Tsahal, l’empêche de fonctionner?
Les services de sécurité de L’AP en Cisjordanie sont virtuellement dans
l’incapacité de fonctionner depuis le début de l’operation Rempart, fin mars, et Tsahal combat le terrorisme palestinien comme il le veut, où il le veut. Une source haut placée au ministère palestinien de l’Information, a dit qu’en privé, surtout parmi les intellectuels de Ramallah, les gens évoquent depuis quelque temps la possibilité qu’Arafat annonce que, puisqu’Israël empêche l’AP d’agir, l’AP transfère à Israël la responsabilité totale de la Cisjordanie.
Du point de vue israélien, a-t-il expliqué, la situation actuelle relève d’une occupation « de luxe ». Tsahal a reinstitué la loi martiale sur tous les habitants de Cisjordanie, mais ne prend aucune responsabilité quant aux services qui doivent leur être fournis. Les ministères civils de l’AP, ainsi que ses services de sécurité, sont plus qu’à demi paralysés, et les coffres de l’AP sont vides, en partie à cause du refus d’Israël de lui transférer l’argent des taxes qu’il lui doit. Ainsi, il vaudrait peut-être mieux pour les Palestiniens faire en sorte qu’Israël reprennne le contrôle de la vie civile palestinienne, et de l’obliger ainsi à payer le prix fort de l’occupation.
Un nouveau membre du cabinet, Hassan al-Khatib, a réagi en disant que les
choses n’en étaient pas encore arrivées là, mais que la politique de Sharon
pourrait bien y mener tout droit.