Il est beaucoup question en ce moment de la « Parade des Drapeaux » souvent présentée dans nombre de médias comme simple défilé, événement anodin, dans le cadre des festivités qui marquent la célébration de la réunification de Jérusalem. Si tel était le cas, on ne comprend pas pourquoi cette parade pose tant de problèmes, pourquoi annulée elle refait surface, pourquoi sortie par la porte elle rentre par la fenêtre…
C’est tout simplement parce que la la Parade des drapeaux, c’est autre chose. C’est d’abord et avant tout un acte militant, et pas n’importe quelle militance…
Organisée par des mouvements nationalistes extrémistes, cette parade vise essentiellement à asséner à la population palestinienne que Jérusalem est totalement juive, que les quartiers où vit cette population, que les rues qu’elle parcourt quotidiennement… ce n’est plus chez elle, elle n’y est que tolérée.
Des milliers de personnes vont parcourir ces lieux en hurlant des slogans haineux, racistes: « mort aux Arabes », « Mahomet est un porc »… et vont venir narguer les résidents palestiniens, contraints de fermer boutiques (sans indemnisation) et de rester cloîtrés chez eux pour éviter tout risque d’agression.
Que ces gens aient le droit de défiler, c’est incontestable. Qu’ils puissent se rendre au Kotel, c’est plus que légitime… mais dans le respect de l’ordre public, sans porter atteinte à la population! D’autres organisations juives proposent un itinéraire différent mais les organisateurs n’en veulent pas pour des raisons politiques et les pouvoirs publics ont entériné jusqu’à présent les débordements qui accompagnent cette manifestation qui ne fait honneur à personne. La joie éprouvée par cette foule en délire n’est pas celle de Jérusalem mais bien plutôt celle d’humilier, de parader, de se comporter en terrain conquis.
Personne n’accepterait cela et c’est sans doute la preuve que leur « chez soi » ce n’est pas Jérusalem-Est. Ces quartiers sont davantage le lieu du pouvoir qu’ils revendiquent, de la puissance qu’il s’octroient et non de l’amour qu’ils manifestent.
Si la question de la tenue de cette manifestation se pose avec acuité cette année, plus que les années précédentes, c’est à cause des incidents judéo-arabes qui se sont produits récemment dans plusieurs villes mixtes. L’interdiction temporaire n’a rien à voir avec les menaces du Hamas, avec le renoncement à ne pas être « maître chez soi »… message que l’extrême droite israélienne véhicule à satiété. Cette décision d’un bon sens auquel on n’était plus habitué, ne relève que de considérations internes d’ordre public.
On ne peut que se féliciter que la police et le pouvoirs en place se posent enfin, même tardivement, des questions de cette nature : quel est l’impact sur le vivre ensemble si essentiel? Comment concilier droit à manifester et intérêts des résidents et défense des valeurs?
Espérons qu’une réponse adéquate sera apportée s’agissant de la marche qui devrait avoir lieu « mardi 15 juin selon un tracé qui sera déterminé par la police et les organisateurs du défilé ».
Espérons que cette approche prévaudra encore à l’avenir et qu’il ne s’agira pas que d’un « one shot »!
Mis en ligne le 14 juin 2021