En Israël, on salue  la mort de Qassem Soleimani mais on se prépare à une réaction agressive de l’Iran et à une aggravation des tensions dans la région.

Traduction et Résumé de l’article : Blandine Le Roy

Illustration : Kichka/(https://kichkafr.files.wordpress.com/2020/01/soleimani.jpg)

Auteur : Ben Caspit, article publié dans Al-Monitor 03/01/2020 : « Israel’s security chiefs fear possible Iran war »

Article publié le 6 janvier 2020

Le meurtre du général  Qasem Soleimani a été ressenti en Israël comme un retour de la dissuasion  américaine au Proche-Orient. Aviv Kochavi, chef d’état-major de Tsahal, qui s’était permis le 25 décembre d’exprimer des critiques voilées envers les Etats-Unis, disant qu’Israël agissait seul contre les Gardiens de la Révolution, a déclaré : « Ce soir soudainement ils font leur retour ».
Une haute personnalité israélienne a également déclaré, sous couvert d’anonymat, à Al-Monitor : « Les Américains signalent qu’ils sont toujours là et que personne ne devrait jouer avec eux. C’est là une excellente nouvelle. »
Un sentiment de satisfaction et d’exaltation  a été ressenti dans les couloirs du pouvoir israélien. Mais ce dernier a fait preuve officiellement de retenue parce que Israël sait très bien dans quelle mesure cet événement historique et stratégique a rapproché toute la région de la guerre. La semaine dernière, A. Kochavi avait déjà mis en garde contre un tel scénario.

B. Caspit : « La situation rappelle quelque peu les premières semaines qui ont suivi la destruction, en 2007, de l’installation nucléaire syrienne de Der ez-Zor. À l’époque, Israël avait gardé un silence total pour fournir au président syrien B. al-Assad  « l’ultime possibilité de nier  » et les conditions idéales pour faire preuve de retenue. »

En Israël, le général Q. Soleimani était considéré comme l’ennemi le plus acharné d’Israël et le grand idéologue de la révolution islamique. Il était celui qui avait poussé toutes les forces de la Garde révolutionnaire vers les frontières d’Israël, Damas et Beyrouth.
B. Caspit : « Lors de réunions à huis clos au cours de l’année écoulée, de hauts responsables israéliens de la défense ont souvent expliqué que la guerre qu’Israël menait n’était pas contre l’Iran, mais contre Soleimani. Les renseignements israéliens et occidentaux ont affirmé que Soleimani ne rendait pas compte à ses supérieurs de ses plans et ne disaient pas toujours la vérité au chef suprême iranien Ali Khamenei, et ont suggéré que, sans lui, l’esprit de la révolution iranienne serait beaucoup plus modéré. »
Un universitaire israélien ayant des antécédents dans le domaine du renseignement a déclaré à Al-Monitor sous couvert d’anonymat : «  Il y a beaucoup de gens comme ça, qui combinent de telles capacités, une idéologie extrême et qui ont une grande influence sur le chef suprême. N’oublions pas que le dirigeant lui-même, l’ayatollah Ali Khamenei, a déjà plus de 80 ans, il souffre d’un cancer de la prostate et dirige un État écrasé économiquement. Maintenant, nous devons retenir notre souffle et prier pour que toute cette pression exercée sur l’Iran brise l’esprit du chef âgé et l’aide à prendre la bonne décision : un changement de direction et l’ouverture de négociations sur un nouvel accord sur le nucléaire avec les Américains. »
 Ben Caspit de conclure : « Israël s’inquiète de la deuxième option qui serait de ne pas changer de direction : une réponse militaire iranienne contre une cible américaine obligerait Trump à répondre une nouvelle fois et forcerait les Iraniens à ouvrir un autre front dirigé sur un objectif plus proche et moins réactif, par exemple Israël. C’est pourquoi le Premier Ministre B. Netanyahou a demandé le 3 janvier à ses ministres d’éviter de réagir au meurtre de Soleimani. Cependant, lui-même n’a pas pu résister à applaudir publiquement le meurtre, à féliciter Donald Trump et à dire qu’Israël se tenait aux côtés des États-Unis. »

 

Ben Caspit est chroniqueur à Al-Monitor et analyste politique dans les journaux  ainsi qu’à la radio et à la TV israéliennes